Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/70

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taient compréhensibles pour M. Bertram, et on procéda contre les Égyptiens, suivant la loi. Chaque porte du hameau fut marquée à la craie par les officiers de la cour foncière, comme un avertissement formel de le quitter prochainement ; cependant ils ne montrèrent aucun symptôme soit de soumission, soit d’acquiescement. À la fin le jour fixé pour le terme, le Jour fatal de la fête de saint Martin arriva, et l’on eut recours à des moyens violents d’expulsion ; un fort détachement d’officiers de paix, assez nombreux pour rendre toute résistance vaine, ordonna aux habitants de partir à midi, et comme ils n’obéissaient pas, les officiers, aux termes de leur mandat, se mirent à découvrir le toit des chaumières et à renverser les misérables portes et croisées, mode d’expulsion abrégé et efficace encore pratiqué dans quelques parties éloignées de l’Écosse, quand un tenancier veut résister. Les Égyptiens, pendant un moment, regardèrent l’ouvrage de destruction dans un morne silence et sans faire un mouvement ; ensuite ils se mirent à seller et à charger leurs ânes et à faire leurs préparatifs de départ : tout cela fut bientôt fait pour des gens qui avaient toutes les habitudes des tartares errants ; ils se mirent donc en route pour aller chercher de nouveaux établissements où leurs patrons ne fussent ni des Quorum, ni Custos Rotulorum[1].

Certains remords de conscience avaient empêché Ellangowan d’assister en personne à l’expulsion de ses tenanciers ; il avait confié l’exécution de cette mesure aux officiers de la loi, sous les ordres immédiats de Franck Kennedy, inspecteur ou officier à cheval de l’excise, qui était devenu depuis peu ami intime de la maison, et dont nous parlerons plus au long dans le prochain chapitre. M. Bertram choisit ce jour lui-même pour faire une visite à un ami à quelque distance, mais il arriva, malgré ses précautions, qu’il ne put éviter de rencontrer ses anciens tenanciers lorsqu’ils s’éloignaient de ses domaines.

Ce fut dans un chemin creux près le sommet d’une montée rapide, sur les confins des domaines d’Ellangowan, que M. Bertram rencontra la caravane égyptienne. Quatre ou cinq hommes formaient l’avant-garde, enveloppés dans de longs et larges manteaux qui cachaient leurs grands corps maigres, comme des chapeaux à larges bords, rabattus sur leurs fronts, ombrageaient et cachaient leurs traits sauvages, leurs yeux noirs, et leurs visages basanés. Deux d’entre eux portaient de longs fusils de chasse, un autre un

  1. Deux titres de justice. a. m.