Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/16

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d’assurer aux voyageurs le passage du Forth[1] avec la marée montante, était semblable à un bulletin ; car bien que midi fût sonné à l’horloge de Saint-Gilles et que celle de Tron l’eût répété[2], la voiture ne se montrait pas au lieu indiqué. Il est vrai que deux places seulement ayant été retenues, il était possible que la dame du logis souterrain se fût entendue avec son Automédon[3] pour qu’en cas semblable il laissât s’écouler quelques momens, afin d’avoir la chance de remplir les places vacantes, ou bien ledit Automédon avait pu être employé à la suite d’un enterrement, et se trouver retenu par la nécessité de dépouiller sa voiture de ses draperies lugubres ; ou peut-être s’était-il arrêté pour boire une demi-pinte extra avec son compère l’hôte : le fait est qu’il n’arrivait pas.

Le jeune homme, qui commençait à s’impatienter un peu, fut bientôt abordé par un compagnon d’infortune : c’était la personne qui avait retenu la seconde place. Celui qui va entreprendre un voyage se distingue en général aisément de ses autres concitoyens. Les bottes, la large redingote, le parapluie, le petit paquet qu’il tient à la main, le chapeau enfoncé sur son front, son air résolu, son pas ferme et important, la brièveté de ses réponses aux salutations des oisifs de sa connaissance, sont des marques auxquelles celui qui a l’habitude de voyager par la diligence ou la malle reconnaît de loin son compagnon de route lorsqu’il se hâte d’arriver au lieu du rendez-vous. C’est alors qu’avec une prudence un peu égoïste, le premier venu s’empresse de s’assurer la meilleure place dans la voiture, et d’arranger son bagage de la manière la plus commode avant l’arrivée de ses compétiteurs. Notre jeune homme, qui n’était pas doué de beaucoup de prévoyance, et qui d’ailleurs, par l’absence de la voiture, était dans l’impossibilité de profiter de son droit de prio-

    cet endroit ou l’on passe à voiles l’embouchure de la rivière du Forth, large ici d’environ quatre milles. La Hawesfly signifie la Mouche de Hawes ; et Hawes, qui proprement veut dire les fruits de l’aubépine, est le nom de l’auberge ou du lieu de départ de la diligence. En général, on applique en Écosse le mot Fly, ou Mouche, aux diligences, à cause de leur célérité plus ou moins grande. a. m.

  1. Le texte dit the Frith, mot qui signifie embouchure d’un fleuve. Le Frith du Forth s’appelle aussi, par abréviation, tout simplement le Frith, pour cette rivière du Forth en Écosse. a. m.
  2. L’église de Saint-Gilles est la principale église d’Édimbourg ; elle était jadis la cathédrale. L’église de Tron se trouve un peu plus bas. Toutes deux sont dans High-Street, la plus belle rue de l’ancienne portion de la capitale de l’Écosse, divisée en vieille ville et ville neuve. a. m.
  3. Expression employée pour cocher, par réminiscence de celui d’Idoménée au siège de Troie. a. m.