Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/446

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vous le fîtes pour le pauvre Steenie Mucklebackit. Quelle peine cela m’a-t-il donnée ? Il m’est égal d’aller d’un côté ou d’un autre, à moi qui suis toujours sur les chemins. Mais, par exemple, j’avoue que j’étais bien joyeux quand je suis sorti de prison, car je craignais que cette maudite lettre n’arrivât pendant que j’étais renfermé là comme une huître, et que tout allât de travers, faute de pouvoir l’aller chercher. Il y avait des fois où je pensais à me décharger sur vous de cela, mais c’eut été désobéir aux ordres positifs de M. Lovel ; et je savais qu’il avait besoin de voir quelqu’un à Édimbourg, avant de pouvoir faire ce qu’il voulait pour sir Arthur et sa famille.

— Et maintenant voyons un peu les affaires publiques, Édie. On dit toujours qu’ils viennent, n’est-ce pas ?

— Ma foi oui, monsieur, et il est arrivé des ordres sévères pour que les volontaires et les forces qui sont ici se tinssent prêts pour une alerte. On dit aussi qu’il va venir ici un jeune officier de mérite pour examiner nos moyens de défense. J’ai vu la servante du bailli qui nettoyait son ceinturon et sa culotte blanche, et je l’ai aidée un peu, car elle ne s’y entendait guère ; si bien que j’ai appris toutes les nouvelles pour ma peine.

— Et que pensez-vous de tout cela, vous, comme vieux soldat ?

— Ma foi, je ne sais pas… S’ils viennent en si grand nombre qu’on le dit, ils seront en force contre nous… Parmi nos volontaires aussi il ne manque pas de vieux enfans, quoiqu’il ne convienne guère de parler de l’incapacité des autres, à moi qui ne suis pas bon à grand’chose non plus maintenant… mais malgré tout cela, nous ferons de notre mieux.

— Comment ! est-ce que l’esprit guerrier se réveillerait aussi en vous, Édie ?

Ici le feu brille jusques aux cendres.

« Je n’aurais pas cru, Édie, que vous eussiez grand’chose à défendre.

— Moi, monsieur ! pas grand’chose à défendre !… Et le pays donc, et les coteaux, et les vallons, que j’aime tant à parcourir ! et les foyers des ménagères, où je trouve mon morceau de pain ! et les petits enfans, qui accourent pour jouer avec moi quand j’arrive à l’entrée d’une ville ! Diable, continua-t-il en saisissant son bâton avec beaucoup d’énergie, si j’avais autant de vigueur que de bonne volonté, avec une aussi bonne cause, j’en coucherais encore quelques uns par terre.