Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/131

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miner, s’il était possible, à prendre une part active à ses affaires. Cependant il employait Rashleigh Osbaldistone dans sa maison de commerce. Mais il avait des moyens de lui trouver une place, et même avantageuse, dès qu’il voudrait se débarrasser de lui ; et quoique j’éprouvasse un certain remords de conscience en songeant que par ma faute Rashleigh, un drôle tel que miss Vernon me l’avait peint, allait s’introduire dans la maison de mon père… peut-être dans sa confiance… je le fis taire en me disant que mon père était maître absolu de ses affaires, qu’il n’était pas homme à se laisser duper ou influencer, et que mes préventions contre mon jeune cousin m’avaient été suggérées par une jeune fille bizarre et irréfléchie, dont la franchise et l’étourderie devaient me mettre en garde contre une opinion prise trop légèrement peut-être. Mes pensées se reportèrent alors naturellement sur miss Vernon, sur son extrême beauté, sur sa situation toute particulière, abandonnée à elle-même, à ses propres lumières, sans guide, sans défenseur ; enfin, sur son caractère en général, qui offrait cette variété de charmes qui piquent notre curiosité et attirent notre attention en dépit de nous-mêmes. J’avais assez de bon sens pour voir que la compagnie de cette singulière jeune fille et les occasions nombreuses qui se présenteraient de nous trouver seuls ensemble augmenteraient les dangers de mon séjour au château, si elles en diminuaient l’ennui ; mais je ne pus, malgré tous les efforts de ma prudence, envisager avec beaucoup d’effroi la chance nouvelle et bizarre que j’allais courir. Je levai encore ce scrupule, comme les jeunes gens lèvent toutes les difficultés de ce genre… je serai circonspect, toujours sur mes gardes ; je verrai dans miss Vernon plutôt un compagnon qu’une amie ; et tout ira bien. Je m’endormis au milieu de ces réflexions, ma dernière pensée s’arrêtant naturellement sur miss Vernon.

Si je la revis en rêve, je ne pourrais le dire, car j’étais harassé et mon sommeil fut profond ; mais ce fut la première personne à qui je pensai le lendemain, réveillé à la pointe du jour par les gaies fanfares du cor de chasse. Me lever, faire seller mon cheval, fut l’affaire de deux minutes, et bientôt je descendis dans la cour, où hommes, chiens et chevaux, étaient déjà prêts. Mon oncle, qui peut-être ne s’attendait pas à trouver un ardent chasseur dans son neveu élevé en pays étranger, sembla fort surpris de me voir, et je crus remarquer dans son bonjour moins de cordialité et de franchise que dans son premier accueil. « Te voilà