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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 1.djvu/194

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Durval, d’un air pénétré.

Eh ! bien, sois donc enfin le seul dépositaire
D’un secret dont je vais t’avouer le mystere ;
Que du fond de mon cœur, il passe au fond du tien ;
Qu’il y reste caché, comme il l’est dans le mien.
Mes inclinations, ami, sont bien changées ;
Mes infidélités vont être bien vengées…
J’aime… Hélas ! que ce terme exprime foiblement
Un feu… qui n’est pourtant qu’un renouvellement,
Qu’un retour de tendresse imprévue, inouie,
Mais qui va décider du reste de ma vie !

Damon, avec étonnement.

Quoi ! ton volage cœur se livrera toujours
À des feux étrangers, à de folles amours !
Ces ardeurs autrefois si pures & si tendres,
Ne pourront-elles plus renaître de leurs cendres ?
Tu perds tous les plaisirs que tu cherches ailleurs ;
L’inconstance est souvent un des plus grands malheurs.

Durval.

Apprends quel est l’objet qui cause mon supplice.

Damon.

Non ; je suis ton ami, mais non pas ton complice.

Durval.

Ne m’abandonne pas dans mes plus grands besoins ;
Permets-moi d’achever : je compte sur tes soins.

Damon, en s’éloignant.

Je ne veux point entrer dans cette confidence.

Durval, en le ramenant.

Je puis t’en informer sans aucune imprudence.