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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 1.djvu/266

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De la rendre odieuse autant que je la hais ;
Mais sa fausse vertu couvre tous ses forfaits.

Damon.

J’ignore les détails de cette perfidie ;
Mais je connois Constance, & je mettrois ma vie…

Durval.

Tu la perdrois… Constance… Ô regret superflu !
J’ai creusé cet abîme où son cœur s’est perdu ;
Mon exemple a causé la chûte qui m’accable.
Est-ce une autorité qu’un exemple coupable ?

Damon.

Ne le suivez donc plus, comme vous avez fait,
Puisque vous convenez d’un si funeste effet.
Si tu voulois pourtant m’instruire davantage,
Ton repos deviendroit peut-être mon ouvrage :
Tu n’as que trop suivi ton premier mouvement.

Durval.

Je le paye assez cher, hélas ! en ce moment.
J’avois beau m’enflammer & m’irriter contre elle,
J’ai frémi du danger où j’ai mis l’infidelle ;
Et je mourois du coup que j’allois lui porter.

Damon.

J’ai des pressentimens que je ne puis m’ôter.

Durval.

Ils sont faux ; mais enfin je cède à ta priere :
Suis-moi, je t’en ferai la confidence entiere.
Mais ce n’est point l’espoir d’être désabusé
Qui m’arrache un récit que j’aurois refusé.
Je te veux inspirer la fureur qui m’anime :
Tu sens que j’ai besoin de plus d’une victime ;
Puisque j’ai des rivaux, je dois compter sur toi,
Et tu vas t’engager à te perdre avec moi.