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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 1.djvu/335

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C’est d’un autre que moi dont la Cour a fait choix.

Ariste.

Sçavez-vous si cet autre accepte ?

Monrose.

Savez vous si cet autre accepte ?Ah ! je le crois.

Ariste.

Ou vous le supposez. Est-ce une conséquence ?
On revient quelquefois de plus loin qu’on ne pense.
Empêchez cependant qu’on n’aille débiter
À la Cour, & par-tout, que vous voulez quitter.
Un bruit si ridicule a l’air d’une menace,
Ou du moins d’un dépit qui n’est pas à sa place.

Monrose.

Ce sont mes ennemis…

Ariste.

Ce sont mes ennemis…Non ; ce n’est point eux.
Il est bien d’autres gens qui sont plus dangereux.
Ne croyez pas, Monsieur, que je taxe personne
Dans ces réflexions que je vous abandonne.
Quand j’y pense, entre nous, je vois présentement
Que l’amitié se donne & se prend aisément ;
Elle est, comme l’amour, hazardeuse & légere.
Une conformité, frivole & passagere
D’âge, d’état, d’humeur, & sur-tout de plaisir,
Sans nul autre examen, suffit pour nous saisir.
Nous nous associons, comme on fait en voyage,
Sans savoir avec qui le hasard nous engage ;
Et l’on devient ami comme on devient amant.
Pour faire une maîtresse, il ne faut qu’un moment :