Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/117

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Paris trois semaines après être accouchée. Peu de femmes de ma qualité en auroient fait autant, mais que ne faisoit-on point pour jouir d’un bien aussi précieux que la paix ? Pour achever de me remettre, il me fit demeurer dans un des plus chétifs villages de tout le pays, et dans une maison si vilaine, qu’on étoit contraint de se tenir tout le jour dans les prés. Il choisissoit toujours ces sortes de lieux, afin que je ne visse point de compagnie. Aussi, bien loin d’en avoir dans le village même, ceux que la civilité ou les affaires obligeoient à l’y venir voir, étoient contraints de camper faute de cabaret ; et, pour peu qu’ils lui déplussent, il les renvoyoit bientôt sous prétexte de diverses affaires, dont il les chargeoit, et qui dépendoient de lui dans la province. Cependant nous passâmes six mois, dans cet agréable séjour, l’année 1666.

Une autre fois qu’il étoit seul à Bourbon, et qu’il m’avoit envoyée en Bretagne, il eut encore avis par ses espions que je m’y divertissois assez avec Mme de Coatquin, et qu’il se passoit peu de jours que nous ne fissions quelque partie de promenade par terre ou sur mer. Son inquiétude le reprend. Il me mande que je l’aille joindre à Nevers où il y avoit, disoit-il, de fort bons comédiens entre autres divertissements. Je commencois à me lasser de faire de semblables corvées ; j’écrivis à M. Colbert pour m’en plaindre, mais m’ayant conseillé de partir, je fus bien surprise de trouver M. Mazarin à dix lieues de Nevers, qui s’en venoit à Paris avec mon frère qui revenoit d’Italie. Il ne me rendit jamais aucune raison d’un procédé si extraordinaire, et nous fûmes sans autre éclaircissement nous confi-