Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/168

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Je voudrois bien vous voir faire, à la naissance de la Reine, ce que fit autrefois Bussi d’Amboise[1] à un tournois. Ayant su que tous les grands seigneurs de la Cour devoient faire des dépenses extraordinaires pour leurs équipages et pour leurs habits, il habilla ses gens comme des seigneurs, et marcha vêtu fort simplement, au milieu de ce train si magnifique. La nature fit valoir tellement ses avantages en la personne de Bussi, que Bussi fut

  1. Louis d’Amboise, seigneur de Bussi, marquis de Reinel, capitaine de 50 hommes d’armes du Roi, gouverneur et lieutenant général en Anjou, premier gentilhomme de la chambre du duc d’Alencon, se rendit illustre par son savoir, par son courage et par sa politesse. La reine Marguerite en parle avec éloge dans ses Mémoires, et comme d’une personne qui ne lui étoit pas indifférente : elle avoue même qu’on disoit hautement au roi Henri IV, son mari, qu’il la servoit. Bussi fut malheureusement assassiné dans son gouvernement d’Anjou, à l’âge d’environ vingt-huit ans. Le comte de Montsoreau ayant su qu’il voyoit sa femme, la força, le poignard sur la gorge, de lui écrire de se rendre incessamment auprès d’elle. Bussi vint ; et dès que le comte sut qu’il étoit dans la chambre de sa femme, il s’y jeta avec cinq ou six hommes armés. Bussi ne trouvant pas la partie égale, sauta par une fenêtre dans la cour : mais il s’y vit bientôt attaqué par d’autres personnes. Il se défendit longtemps avec une vigueur et une fermeté incroyables, et leur vendit chèrement sa vie. Brantôme n’a pas osé s’étendre sur la mort tragique de Bussi d’Amboise, en donnant l’abrégé de sa vie, dans ses Hommes illustres.