Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/17

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recommande surtout Don Quichotte : quelque affliction que vous ayez, la finesse de son ridicule vous conduira imperceptiblement à la joie.

Vous me direz peut-être que je n’ai pas été d’une humeur si enjouée dans mes malheurs que je le parois dans les vôtres, et qu’il est malhonnête de donner toutes ses douleurs à ses maux, lorsqu’on garde son indifférence et sa gaieté même pour ceux de ses amis. J’en demeurerois d’accord avec vous, si j’en usois de la sorte ; mais je puis dire avec vérité, que je ne suis guères moins sensible à votre exil que vous-même : et la joie que je vous conseille est à dessein de m’en attirer, quand je vous aurai vu capable d’en recevoir.

Pour ce qui regarde mes malheurs, si je vous y ai paru plus triste que je ne vous parois aujourd’hui, ce n’est pas que je le fusse en effet. Je croyais que les disgrâces exigeoient de nous la bienséance d’un air douloureux, et que cette mortification apparente étoit un respect dû à la volonté des supérieurs, qui songent rarement à nous punir sans dessein de nous affliger : mais sachez que sous de tristes dehors et une contenance mortifiée, je me suis donné toute la satisfaction que j’ai su trouver en moi-même, et tout le plaisir que j’ai pu prendre dans le commerce de mes amis.

Après avoir trouvé ridicule la gravité de la