Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/77

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que je ne lui en donne, que de le faire plus capable et plus délicat que je ne le trouverois. Il lui arrive la même chose qu’à ces femmes trop belles qui laissent toujours quelque chose à désirer dans leurs portraits ; elles doivent être ravies de ruiner la réputation de tous les peintres.

Madame Bourneau m’a fait un très-méchant tour, d’avoir montré un sentiment confus que je lui avois envoyé sur l’Alexandre : c’est une femme que j’ai fort vue en Angleterre, et qui a l’esprit très-bien fait : elle m’envoya cette pièce de Racine, avec prière de lui en écrire mon jugement. Je ne me donnai pas le loisir de bien lire sa tragédie, et je lui écrivis en hâte ce que j’en pensois, la priant, autant qu’il m’étoit possible, de ne point montrer ma lettre. Moins religieuse que vous à se gouverner selon les sentiments de ses amis, il se trouve qu’elle l’a montrée à tout le monde, et qu’elle m’attire aujourd’hui l’embarras que vous me mandez. Je hais extrêmement de voir mon nom courir par le monde presqu’en toutes choses, et particulièrement en celles de cette nature. Je ne connois point Racine ; c’est un fort bel esprit, que je voudrais servir ; et ses plus grands ennemis ne pourroient pas faire autre chose que ce que j’ai fait sans y penser. Cependant, Monsieur, s’il n’y a pas moyen d’empêcher que