sur sa famille et sur sa vie ; il s’est trompé sur sa mort ; il s’est trompé sur lui-même, en cette rencontre ; et si ce n’étoit l’esprit, qui est bien celui de Voltaire, je serois tenté de contester l’authenticité de la biographie de Ninon, qu’on lit dans les Mélanges littéraires. Il s’est passé, à ce sujet, quelque chose d’inexplicable. Dans le Temple du goût, composé comme on sait, vers 1731, Voltaire avoit placé Ninon près du sanctuaire du dieu, dans un groupe de délicats, Chapelle et Chaulieu à leur tête :
Ninon, cet objet si vanté,
Qui si longtemps sut faire usage
De son esprit, de sa beauté,
Et du talent d’être volage,
Fesoit alors, avec gaîté,
À ce charmant aréopage,
Un discours sur la volupté.
Dans cet art elle étoit maîtresse ;
L’auditoire étoit enchanté,
Et tout respiroit la tendresse.
Voltaire sembloit écouter complaisamment alors le discours de Ninon. Mais voici qu’en 1773 il retranche cet éloge gracieux de la nouvelle édition du Temple du goût, celle qu’on lit aujourd’hui dans ses Œuvres ; de sorte que les vers qu’on vient d’entendre ne sont conservés depuis lors qu’en variante. Cette suppression étoit conséquente avec la notice qu’en 1771 Voltaire avoit donnée de Ninon : notice si peu flatteuse, et dont presque tous les récits sont aujourd’hui reconnus erronnés. Le père de Voltaire a été, nous le savons, notaire de Mlle de Lenclos, et à ce titre, a signé son acte de décès, en compagnie du fils du célèbre Gourville, le 17 octobre