que l’on fait, et de la contrainte à s’abstenir de ce que l’on ne fait pas. Celui de la sagesse est doux et tranquille. La sagesse règne en paix sur nos mouvements, et n’a qu’à bien gouverner des sujets, au lieu que la vertu avoit à combattre des ennemis.
Je puis dire de moi une chose assez extraordinaire, et assez vraie ; c’est que je n’ai presque jamais senti, en moi-même, ce combat intérieur de la passion et de la raison. La passion ne s’opposoit point à ce que j’avois résolu de faire par devoir ; et la raison consentoit volontiers à ce que j’avois envie de faire, par un sentiment de plaisir. Je ne prétends pas que cet accommodement si aisé me doive attirer de la louange : je confesse, au contraire, que j’en ai été plus vicieux ; ce qui ne venoit point d’une perversion d’intention qui allât au mal, mais de ce que le vice se faisoit agréer, comme une douceur, au lieu de se laisser connoître, comme un crime.
Il est certain qu’on connoît beaucoup mieux la nature des choses, par la réflexion, quand elles sont passées, que par leur impression, quand on les sent. D’ailleurs, le grand commerce du monde empêche toute attention, lorsqu’on est jeune. Ce que nous voyons en autrui, ne nous laisse pas bien examiner ce que nous sentons en nous-mêmes. La foule plaît, dans un