Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/552

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lement, et ce qui mérite bien que nous y fassions réflexion.

Il est certain qu’on ne doit pas regarder son prince, comme son ami. L’éloignement qu’il y a de l’empire à la sujétion, ne laisse pas former cette union des volontés, qui est nécessaire pour bien aimer. Le pouvoir du prince et le devoir des sujets, ont quelque chose d’opposé aux tendresses que demandent les amitiés.

Exercer la domination, sans violence, c’est tout ce que peut faire le meilleur prince ; obéir sans murmure, c’est tout ce que peut faire le meilleur sujet. Or, la modération et la docilité ont peu de charmes. Ces vertus sont trop peu animées, pour faire naître les inclinations, et inspirer la chaleur de l’amitié. La liaison ordinaire, qui se trouve entre les rois et leurs courtisans, est une liaison d’intérêt. Les courtisans cherchent de la fortune avec les rois : les rois exigent des services de leurs courtisans.

Cependant, il y a des occasions, où l’embarras des affaires, où le dégoût de la magnificence, oblige les princes à chercher, dans la pureté de la nature, les plaisirs qu’ils ne trouvent pas, dans leur grandeur. Ennuyés de cérémonies, de gravités affectées, de contenances, de représentations, ils cherchent les douceurs, toutes naturelles, d’une liberté que leur condition leur ôte. Travaillés de soupçons et de jalou-