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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/355

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et la seconde ne vous paroîtra pas moins juste en quelques endroits. Par exemple, pour rendre :

Victrix causa Diis placuit, sed victa Catoni,

Brebeuf a dit seulement :

Les dieux servent César, et Caton suit Pompée.

C’est une expression basse qui ne répond pas à la noblesse de la latine. Outre que c’est mal entrer dans le sens de l’auteur ; car Lucain qui a l’esprit tout rempli de la vertu de Caton, le veut élever au-dessus des dieux, dans l’opposition des sentiments sur le mérite de la cause ; et Brebeuf tourne une image noble de Caton, élevé au-dessus des dieux, en celle de Caton, assujetti à Pompée.

Quant à Segrais, il demeure partout bien au-dessous de Virgile : ce qu’il avoue lui-même aisément ; car il seroit fort extraordinaire qu’on pût rendre une traduction égale à un si excellent original. D’ailleurs un des plus grands avantages du poëte consiste dans la beauté de l’expression : ce qu’il n’est pas possible d’égaler dans notre langue, puisque jamais on n’a su le faire dans la sienne. Segrais doit se contenter d’avoir mieux trouvé le génie de Virgile, que pas un de nos auteurs ; et quelque grâce qu’ait perdu l’Énéide entre ses mains,