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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/413

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vous vous serez mieux consultée. Le désir de la vengeance fut la première passion d’Émilie : le dessein de rétablir la république se joignit au désir de la vengeance ; l’amour fut un effet de la conspiration, et il entra dans l’âme des conspirateurs, plus pour y servir que pour y régner.

Joignons à la douceur de venger nos parens,
La gloire qu’on remporte à punir les tyrans ;
Et faisons publier par toute l’Italie :
La liberté de Rome est l’œuvre d’Émilie.
On a touché son âme, et son cœur s’est épris ;
Mais elle n’a donné son amour qu’à ce prix4.

Vous êtes née à Rome, Madame, et vous y avez reçu l’âme des Porcies et des Arries5, au lieu que les autres qu’on y voit naître n’y prennent que le génie des Italiens. Avec cette âme toute grande, toute romaine, si vous viviez aujourd’hui dans une république qu’on opprimât ; si vos parents y étoient proscrits, votre maison désolée, et, ce qui est le plus odieux à une personne libre, si votre égal étoit devenu votre maître ; ce couteau que vous avez acheté pour vous tuer, quand vous verrez la ruine de votre patrie ; ce couteau ne seroit-il pas essayé contre le tyran, avant que d’être em-


4. Paroles d’Émilie à sa confidente, dans Cinna.

5. Femmes de Brutus et de Pétus.