remontrances : aussi était-il à peu près de l’âge de M. Roberval, quand je le voyais, et moi j’étais fort jeune homme, différence qui ne pouvait pas me rendre fort persuasif à son égard, quoique d’ailleurs je fusse fort bien avec lui. Cet exemple peut faire voir en passant ce que peut la prévention encore sur des habiles gens, car il l’était véritablement, et il est parlé de M. Hardy avec estime dans les lettres de M. Descartes. Mais je l’ai allégué seulement pour montrer combien, on se peut tromper en niant une idée de l’autre, quand on ne les a pas assez approfondies où il en est besoin.
§ 5. Ph. Par rapport à la connexion ou coexistence, nous avons fort peu de propositions évidentes par elles-mêmes ; il y en a pourtant, et il paraît que c’est une proposition évidente par elle-même que deux corps ne sauraient être dans le même lieu.
Th. Beaucoup de chrétiens vous le disputent, connue j’ai déjà marqué, et même Aristote et ceux qui après lui admettent des condensations réelles et exactes, qui réduisent un même corps entier dans un plus petit lieu que celui qu’il remplissait auparavant, et qui, connue feu M. Comenius [1] dans un petit livre exprès, prétendent renverser [2] la philosophie moderne par l’expérience de l’arquebuse à vent, n’en doivent point convenir. Si vous prenez le corps pour une masse impénétrable, votre énonciation sera vraie, parce qu’elle sera identique ou à peu près ; mais on vous niera que le corps réel soit tel. Au moins dira-t-on que Dieu le pourrait faire autrement, de sorte qu’on admettra seulement cette impénétrabilité comme conforme à l’ordre naturel des choses que Dieu a établi et dont l’expérience nous a assurés, quoique d’ailleurs il faille avouer qu’elle est aussi très conforme à la raison.
§ 6. Ph. Quant aux relations des modes, les mathématiciens ont formé plusieurs axiomes sur la seule relation d’égalité, connue celui dont vous venez de parler « que si des choses égales on ôte des choses égales, le reste est égal. » Mais il n’est pas moins évident, je pense, qu’un et un sont égaux à deux, et que, si de cinq doigts d’une main vous en ôtez deux et encore deux autres de cinq de l’autre main, le nombre des doigts qui restera sera égal.