contre les principes supposés gratis. Quand on demande des præcognita dans les sciences, ou des connaissances antérieures, qui servent à fonder la science, on demande des principes connus, et non pas des positions arbitraires dont la vérité n’est point connue ; et même Aristote l’entend ainsi, que les sciences inférieures et subalternes empruntent leurs principes d’autres sciences supérieures où ils ont été démontrés, excepté la première des sciences que nous appelons la métaphysique, qui selon lui ne demande rien aux autres et leur fournit les principes dont elles ont besoin ; et quand il dit : δεῖ πιστεύειν τὸν μανθάνοντα, l’apprenti doit croire son maître, son sentiment est qu’il ne le doit faire qu’en attendant, lorsqu’il n’est pas encore instruit dans les sciences supérieures, de sorte que ce n’est que par provision. Ainsi l’on est bien éloigné de recevoir des principes gratuits. À quoi il faut ajouter que même des principes dont la certitude n’est pas entière peuvent avoir leur usage, si l’on ne bâtit là-dessus que par démonstration, car, quoique toutes les conclusions en ce cas ne soient que conditionnelles et vaillent seulement en supposant que ce principe est vrai, néanmoins cette liaison même et ces énonciations conditionnelles seraient au moins démontrées ; de sorte qu’il serait fort à souhaiter que nous eussions beaucoup de livres écrits de cette manière, où il n’y aurait aucun danger d’erreur, le lecteur ou disciple étant averti de la condition. Et on ne réglera point la pratique sur ces conclusions, qu’à mesure que la supposition se trouvera vérifiée ailleurs. Cette méthode sert encore elle-même bien souvent à vérifier les suppositions ou hypothèses, quand il en naît beaucoup de conclusions, dont la vérité est connue d’ailleurs, et quelquefois cela donne un parfait retour suffisant à démontrer la vérité de l’hypothèse. M. Conring [1], médecin de profession, mais habile homme en toute sorte d’érudition, excepté peut-être les mathématiques, avait écrit une lettre à un ami, occupé à faire réimprimer à Helmstædt le livre de Viottus [2], philosophe péripatéticien estimé, qui tâche d’expliquer la démonstration et les analytiques postérieures d’Aristote. Cette lettre fut jointe au livre, et M. Conring y reprenait Pappus [3], lorsqu’il dit : que l’analyse propose de trouver l’in-
- ↑ Conring, médecin, publiciste et polygraphe célèbre du xviie siècle, né à Norden en Frise (1606), mort à Helmstadt en Suède en 1681. Il a publié un nombre considérable d’ouvrage de médecine et de politique. P. J.
- ↑ Viotti (Bartholomeo), philosophe et physicien, professeur à l’Université de Turin, mort en 1568. P. J.
- ↑ Pappus, philosophe et mathématicien d’Alexandrie, vivait sous le règne de