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Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/473

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de la connaissance

que la forme scolastique des syllogismes est peu employée dans le monde, et qu’elle serait trop longue et embrouillerait si on la voulait employer sérieusement. Et cependant, le croiriez-vous ? je tiens que l’invention de la forme des syllogismes est une des plus belles de l’esprit humain, et même des plus considérables. C’est une espèce de mathématique universelle, dont l’importance n’est pas assez connue ; et l’on peut dire qu’un art d’infaillibilité y est contenu, pourvu qu’on sache et qu’on puisse s’en bien servir, ce qui n’est pas toujours permis. Or il faut savoir que, par les arguments en forme, je n’entends pas seulement cette manière scolastique d’argumenter dont on se sert dans les collèges, mais tout raisonnement qui conclut par la force de la forme, et où l’on n’a besoin de suppléer aucun article ; de sorte qu’un sorite, un autre tissu de syllogismes, qui évite la répétition, même un compte bien dressé, un calcul d’algèbre, une analyse des infinitésimales me seront à peu près des arguments en forme, puisque leur forme de raisonner a été prédémontrée, en sorte qu’on est sûr de ne s’y point tromper. Et peu s’en faut que les démonstrations d’Euclide ne soient des arguments en forme le plus souvent ; car, quand il fait des enthymèmes en apparence, la proposition supprimée et qui semble manquer est suppléée par la citation à la marge, où l’on donne le moyen de la trouver déjà démontrée ; ce qui donne un grand abrégé sans rien déroger à la force. Ces inversions, compositions et divisions des raisons, dont il se sert, ne sont que des espèces de formes d’argumenter particulières et propres aux mathématiciens et à la matière qu’ils traitent, et ils démontrent ces formes avec 1’aide des formes universelles de la logique. De plus, il faut savoir qu’il y a des conséquences syllogistiques bonnes et qu’on ne saurait démontrer à la rigueur par aucun syllogisme sans en changer un peu les termes ; et ce changement même des termes fait la conséquence syllogistique. Il y en a plusieurs, comme entre autres a recto ad obliquum. Par exemple : Jésus-Christ est Dieu ; donc la mère de Jésus-Christ est la mère de Dieu ; item, celle que des habiles logiciens ont appelée inversion de relation, comme, par exemple, cette conséquence : si David est père de Salomon, sans doute Salomon est fils de David. Et ces conséquences ne laissent pas d’être démontrables par des vérités dont les syllogismes vulgaires mêmes dépendent. Les syllogismes aussi ne sont pas seulement catégoriques, mais encore hypothétiques, où les disjonctifs sont compris. Et l’on peut dire que les catégoriques sont simples ou composés.