Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/741

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37. Et comme tout ce détail n’enveloppe que d’autres contingents antérieurs ou plus détaillés, dont chacun a encore besoin d’une analyse semblable pour en rendre raison, on n’en est pas plus avancé, et il faut que la raison suffisante ou dernière soit hors de la suite ou séries de ce détail des contingences, quelque infini qu’il pourrait être.

38. Et c’est ainsi que la dernière raison des choses doit être dans une substance nécessaire, dans laquelle le détail des changements ne soit qu’éminemment, comme dans la source, et c’est ce que nous appelons Dieu. (§ 7.)

39. Or cette substance étant une raison suffisante de tout ce détail, lequel aussi est lié par tout, il n’y a qu’un Dieu et ce Dieu suffit.

40. On peut juger aussi que cette substance suprême qui est unique, universelle et nécessaire, n’ayant rien hors d’elle qui en soit indépendant, et étant une suite simple de l’être possible, doit être incapable de limites et contenir tout autant de réalité qu’il est possible.

41. D’où il s’ensuit que Dieu est absolument parfait ; la perfection n’étant autre chose que la grandeur de la réalité positive prise précisément, en mettant à part les limites ou bornes dans les choses qui en ont. Et là, où il n’y a point de bornes, c’est-à-dire en Dieu, la perfection est absolument infinie. (§ 22. Préf., 4, a.)

42. Il s’ensuit aussi que les créatures ont leurs perfections de l’influence de Dieu, mais qu’elles ont leurs imperfections de leur nature propre incapable d’être sans bornes. Car c’est en cela qu’elles sont distinguées de Dieu. Cette imperfection originale des créatures se remarque dans l’inertie naturelle des corps (§§ 20, 27-30, 153, 167, 377 et suiv.)[1].

43. Il est vrai aussi qu’en Dieu est non seulement la source des existences, mais encore celle des essences, en tant que réelles, ou de ce qu’il y a de réel dans la possibilité. C’est parce que l’entendement de Dieu est la région des vérités éternelles ou des idées dont elles dépendent, et que sans lui il n’y aurait rien de réel dans les possibilités, et non seulement rien d’existant, mais encore rien de possible (§ 20.)

44. Car il faut bien que s’il y a une réalité dans les essences

  1. Ce dernier membre de phrase manque dans le manuscrit autographe, mais a été ajouté par Leibniz dans l’une des copies.