Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 2.djvu/27

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pas suivant le principe du nécessaire, mais suivant les principes du convenable ; comment la prédétermination que j’admets est toujours inclinante et jamais nécessitante ; comment Dieu ne refusera pas les lumières nécessaires nouvelles à ceux qui ont bien usé de celles qu’ils avaient ; sans parler d’autres éclaircissements que j’ai tâché de donner sur quelques difficultés qui m’ont été faites depuis peu. Et j’ai suivi encore le conseil de quelques amis, qui ont cru à propos que j’ajoutasse deux appendices : l’un sur la controverse agitée entre M. Hobbes et l’évêque Bramhall, touchant le libre et le nécessaire ; l’autre sur le savant ouvrage de l’Origine du mal, publié depuis peu en Angleterre.

Enfin j’ai tâché de tout rapporter à l’édification ; et si j’ai donné quelque chose à la curiosité, c’est que j’ai cru qu’il fallait égayer une matière dont le sérieux peut rebuter. C’est dans cette vue que j’ai fait entrer dans ce discours la chimère plaisante d’une certaine théologie astronomique, n’ayant point sujet d’appréhender qu’elle séduise personne, et jugeant que la réciter et la réfuter est la même chose. Fiction pour fiction, au lieu de s’imaginer que les planètes ont été des soleils, on pourrait concevoir qu’elles ont été des masses fondues dans le soleil et jetées dehors, ce qui détruirait le fondement de cette théologie hypothétique. L’ancienne erreur des deux principes, que les Orientaux distinguaient par les noms d’Oromasdes et d’Arimanius, m’a fait éclaircir une conjecture sur l’histoire reculée des peuples, y ayant de l’apparence que c’étaient les noms de deux grands princes contemporains : l’un, monarque d’une partie de la Haute-Asie, où il y en a eu depuis d’autres de ce nom ; l’autre, roi des Celto-Scythes, faisant irruption dans les états du premier, et connu d’ailleurs parmi les divinités de la Germanie. Il semble en effet que Zoroastre[1] a employé les noms de ces princes comme des symboles des puissances invisibles, auxquelles leurs exploits les faisaient ressembler dans l’opinion des Asiatiques. Quoique d’ailleurs

  1. Zoroastre, fondateur du Magisme ou Mazdéisme, religion des anciens Perses, qui s’est conservée jusqu’à nos jours sous le nom de Parsisme. On ne sait absolument rien sur ce personnage mystérieux. Le livre sacré, qui lui est attribué, est le Zeml-Aoesla, dont le texte Zeml a été rapporté en Europe par Anquetil Du Perron, et publié avec une traduction française, aujourd’hui très-dépassée, Paris, 1771, 2 vol. en 3 tomes. Klcnker en a donné une traduction allemande en 3 vol. in-4o, Higa, 1761 ; Eugène Burnouf, dans son Commentaire sur l’Yaçna, en a traduit et expliqué une partie. On sait que cet illustre savant est arrivé à restituer la langue zend, que personne ne comprenait avant lui, les traductions d’Anquetil Duperron ayant été faites sur des intermédiaires.