Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/180

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réunis, si un seul ne suffisait pas, seraient la source de sa perte.

Cependant, comme on ne peut à mon avis tenir ici la balance parfaitement égale, ni maintenir un juste équilibre, il faut, dans l’établissement d’une république, embrasser le parti le plus honorable, et l’organiser de manière que si la nécessité la portait à s’agrandir, elle pût conserver ce qu’elle aurait conquis. Et, pour en revenir à mon premier raisonnement, je pense qu’il est nécessaire d’imiter la constitution romaine et non celle des autres républiques, parce que je ne crois pas qu’il soit possible de choisir un terme intermédiaire entre ces deux modes de gouvernement, et qu’il faut tolérer les inimitiés qui peuvent s’élever entre le peuple et le sénat, les regardant comme un mal nécessaire pour parvenir à la grandeur romaine. Outre les motifs que j’ai déjà allégués, et par lesquels j’ai démontré que l’autorité tribunitienne était indispensable à la conservation de la liberté, on peut reconnaître aisément l’avantage que produisait dans les républiques le pouvoir d’accuser, qui faisait partie des attributions des tribuns, ainsi qu’on le développera dans le chapitre suivant.



CHAPITRE VII.


Combien les accusations sont nécessaires dans une république pour maintenir la liberté.


On ne peut donner aux gardiens de la liberté d’un État un droit plus utile et plus nécessaire que celui de pouvoir accuser, soit devant le peuple, soit devant un magistrat ou tribunal quelconque, les citoyens qui auraient commis un délit contre cette liberté. Cette mesure a dans une république deux effets extrêmement importants : le premier est que les citoyens, dans la crainte