Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/339

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égale affection toutes les villes qui lui obéissent, et il leur laisse l’exercice de leur industrie et la jouissance de presque toutes leurs antiques coutumes ; de sorte que si ces villes ne peuvent plus s’agrandir comme lorsqu’elles étaient libres, leur esclavage ne les met pas non plus en danger de périr. Je parle ici de la servitude dans laquelle tombent les cités en obéissant à un étranger ; j’ai parlé déjà de celle dont un de leurs citoyens les accable.

Si l’on réfléchit avec attention à tout ce que je viens de dire, on ne s’étonnera pas de la puissance des Samnites tant qu’ils furent libres, et de la faiblesse dans laquelle les fit tomber la servitude. Tite-Live atteste cette faiblesse dans une multitude de passages, particulièrement lorsqu’il parle de la guerre contre Annibal, où il rapporte que les Samnites, étant maltraités par une légion qui se trouvait à Nola, envoyèrent des députés à Annibal, pour le supplier de venir à leur aide. Dans leurs discours, ils dirent que, pendant cent ans, ils avaient combattu contre les Romains avec leurs propres soldats et leurs propres généraux ; qu’ils avaient un grand nombre de fois résisté aux attaques de deux armées consulaires et de deux consuls ; mais qu’aujourd’hui leur puissance était tellement déchue, qu’ils pouvaient à peine se défendre contre une faible légion romaine qui se trouvait à Nola.



CHAPITRE III.


Rome devint une ville puissante en ruinant les cités voisines, et en admettant facilement les étrangers aux honneurs.


Crescit interea Roma Albæ ruinis. Ceux qui veulent qu’une cité acquière un vaste empire doivent employer toute leur industrie pour la remplir d’habitants : sans