Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/351

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romain et suivre les mêmes principes, qui consistaient à faire une guerre, comme disent les Français, courte et bonne. Ils entraient donc en campagne avec de nombreuses armées ; aussi terminèrent-ils en peu de temps toutes les guerres qu’ils eurent à soutenir contre les Latins, les Samnites et les Toscans. Si l’on fait attention à toutes celles qu’ils firent depuis la fondation de Rome jusqu’à la prise de Véïes, on verra qu’elles furent toutes achevées en six, en dix ou en vingt jours ; car, suivant l’usage qu’ils avaient adopté, dès que la paix était rompue, ils s’avançaient sans délai à la rencontre de l’ennemi et lui livraient immédiatement la bataille. S’ils triomphaient, l’ennemi, pour préserver son territoire des ravages de la guerre, demandait à faire la paix ; et les conditions qu’imposaient ordinairement les Romains étaient une cession de terrain, que l’on convertissait en domaines particuliers, ou que l’on consignait à des colonies, qui, placées sur les frontières des États vaincus, servaient de rempart à celles des Romains, au grand avantage des colons qui possédaient ces terres, et à celui même du peuple de Rome, qui y trouvait une défense qui ne lui coûtait rien.

Nul moyen ne pouvait être plus sûr, plus puissant, ni plus utile. Tant que l’ennemi n’était point en campagne, cette simple défense suffisait ; s’il levait une nombreuse armée pour attaquer cette colonie, les Romains mettaient sur pied une armée non moins forte ; ils lui livraient bataille, et, une fois victorieux, ils lui imposaient de plus rudes conditions, et rentraient soudain dans leurs foyers. C’est ainsi que par degrés ils étendaient leur influence sur leurs ennemis, et augmentaient leurs propres forces.

Ils suivirent cette marche jusqu’à ce qu’ils eurent changé leur système militaire, changement qui eut lieu après la prise de Véïes. C’est alors que, pour pouvoir prolonger la guerre, ils ordonnèrent qu’on accordât une paye