Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/416

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pacem esse fidam, ubi voluntarii pacati sint, neque eo loco ubi servitutem esse velint, fidem sperandam esse. La décision du sénat fut conforme à ce discours ; les Priverates furent admis au rang de citoyens romains, et on les honora de tous les droits de cité, en leur disant : Eos demum qui nihil prœterquam de libertate cogitant dignos esse qui Romani fiant ; tant leur âme généreuse fut touchée de cette réponse pleine de hardiesse et de franchise ! Toute autre eût été lâche et trompeuse.

Ceux qui ont une autre opinion des hommes, et particulièrement des hommes libres, ou qui croient l’être, sont dans une profonde erreur ; et, dans leur aveuglement, les partis qu’ils prennent ne sauraient être bons par eux-mêmes, ni leur offrir aucune utilité. De là naissent les fréquentes révoltes et la chute des États.

Mais, pour en revenir à mon discours, je conclus de ce jugement, et de celui rendu envers les Latins, que lorsqu’il s’agit de décider du sort d’une ville puissante et accoutumée à l’indépendance, il faut ou la détruire, ou la traiter avec douceur ; toute autre manière d’agir est inutile ; mais ce qu’il faut éviter par-dessus tout, ce sont les termes moyens, car rien n’est plus funeste. C’est ce qui arriva aux Samnites lorsqu’ils renfermèrent les Romains aux Fourches Caudines, et qu’ils rejetèrent le conseil de ce vieillard, qui leur proposait, ou de laisser les Romains se retirer avec honneur, ou de les massacrer tous. Ils préférèrent embrasser un terme moyen, en les désarmant, en les faisant passer sous le joug, et en les renvoyant dévorés de honte et de dépit. Bientôt après ils apprirent, à leur détriment, combien le conseil de ce vieillard aurait été utile, et combien leur résolution avait été funeste, comme je le dirai en son lieu d’une manière plus détaillée.