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Lundi 19 Mars 1883
N° 5602. — Édition quotidienne.
Lundi 19 Mars 1883
Un an.................... 55 fr.
Six mois................. 28 50
Trois mois............... 15  »
Un Numéro, à Paris...... 15

— Départements. 20

BUREAUX
Paris, 10, Rue des Saints-Pères
On s'abonne, à Rome, place du Gesù, 8

DÉPARTEMENTS
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Édition semi-quotidienne
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L’UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés

ANNONCES
MM. Ch. LAGRASGE, GSBF et Cie 6, place de la Bourse

FRANCE



PARIS, 18 MARS 1883



Aurons-nous aujourd’hui une grande : manifestation en l’honneur de la Commune, qui n’est plus seulement amnistiée, mais glorifiée? Ou bien la manifestation, annoncée à trop grand fracas, échouera-t-elle comme celles du 9 et du 11 ? Telle est l’unique préoccupation des journaux ce matin, et surtout du gouvernement, qui se montre beaucoup plus effrayé qu’il ne le faudrait dans son propre intérêt. Qu’un gouvernement menacé par ses anciens complices prenne des mesures de défense, c’est son droit, sinon son devoir ; mais il ne doit jamais laisser deviner qu’il a peur. Or, les mesures prisés et annoncées témoignent d’un véritable effarement. Hier on faisait des arrestations préventives, plus ou moins légales, après avoir évoqué le spectre d’une loi de 1848, dont on n’osera pas se servir; aujourd’hui, non content de tenir sur pied l’armée de Paris, on fait savoir que les corps d’armée dans un rayon de plus de cinquante lieues sont prêts à venir investir Paris, et on fait boucher les soupiraux des palais du Sénat et de la Chambre. Ce dernier point ne frise-t-il pas un peu le ridicule ?

On s’aperçoit aux discussions, des Chambres de l’approche des vacances, qui auraient déjà commencé sans la redoutable échéance du 18 mars. A la Chambre des députés on a voté, force crédits extraordinaires, malgré les observations très justes de M. Haentjens, et ratifié, séance tenante, le changement apporté par M. Labiche à la loi sur la caisse des écoles. Au Sénat, on a accepté les modifications que la Chambre avait faites à la loi sur l’organisation judiciaire de la Tunisie. C’était un nouveau soufflet pour le Sénat, auquel la Chambre déniait une fois de plus le droit de prendre l’initiative d’un vote de crédit ; mais le Sénat a l’habitude d’avaler les crapauds, et il a avalé celui-là, malgré les efforts de M. de Gavardie.

On aura demain à la Chambre la discussion de l’interpellation Lefèvre qui, à l’occasion des désordres de Montceau-les-Mines, attaque M. Chagot. On aurait de plus deux interpellations : l'une, du citoyen Clovis Hugues, le poëte chevelu, sur les arrestations d’hier ; l’autre, de M. Fauré, sur l’émeute de Louis-le-Grand.

La nomination inattendu de Mgr Mermillod au siège de Lausanne et Genève produit une profonde impression. Comme il en est question plus loin, nous nous bornons ici à la signaler.

On commente vivement en Angleterre l’attitude prise par M. Gladstone lors de la discussion du bill de M. Parnell modifiant le Land (...). Les organes tories enregistrent avec une visible satisfaction les paroles du chef des whigs qui, en reprenant leurs traditions, se fait des Irlandais d’irréconcilables adversaires. Pour nous, qui n’avons jamais cru à la vérité du libéraralisme de M. Gladstone, son attitude actuelle est toute naturelle.


Voir les DERNIÈRES NOUVELLES, 4e page



Longue séance de petites broutilles sans intérêt. Ce n’est pas que plusieurs de ces broutilles n’offrent un intérêt pécuniaire, mais le contrôle du Parlement est devenu un mot vide de sens. La plupart des projets financiers sont maintenant renvoyés à des commissions de complaisance, dont le rôle est fort simple; elles font semblant d’examiner le projet, puis rédigent un bout de rapport ; celui qui est chargé de la besogne dépose son travail, et sur le champ demande l’urgence avec la discussion immédiate. La majorité s’empresse de voter le tout, urgence, discussion et projet, en deux minutes. Cette procédure n’est pas nouvelle, mais on ne l’employait autrefois que pour les surtaxes sur les alcools ou les poirés dans les petites communes. Aujourd’hui, elle sert à supprimer les discussions gênantes.

M. Haentjens, infatigable, a beau se plaindre tout le temps et faire entendre les plus justes doléances. La majorité, qui d’abord se fâchait, n'écoute même plus l’honorable député. Hier encore, les occasions ne lui ont pas manqué : emprunt pour Montpellier, emprunt pour Grenoble, pour toutes les villes dont les municipalités républicaines gaspillent les finances sans compter. Il ne s’agissait pas, cette fois, de bâtir des collèges universitaires, mais des hôtels des postes. Ce genre de construction ne regarderait-il pas plutôt l’Etat que les municipalités? Qu’importe? Cric, crac, c’est yoté. Et comme cela pendant des heures; n’insistons pas. Même jeu pour les crédits extraordinaires qui ont été sciemment oubliés par M. Tirard lors de l'établissement du budget. Il s’agissait d'établir un équilibre fictif pour cacher le déficit. Ce n’est pas compliqué. Tel service, par exemple, exige une centaine de millions ; on le passe pour soixante ou soixante-dix ; c’est trente millions de gagnés... pour trois mois, au bout desquels on les redemande sous forme de crédits extraordinaires. Cette façon d’établir le budget est pitoyable au point de vue financier parce qu’elle embrouille tous les comptes, et malhonnête au point de vue politique parce qu’elle a pour but de tromper les Chambres et le pays. Elle est, depuis quelques années, la règle que suivent les ministres républicains. M. Tirard ne pouvait laisser sans réponse les justes critiques dont le criblait M. Haentjens; il a essayé de se défendre tant bien que mal, il n’a pas réussi. Le truc commence à être terriblement usé. Il faudrait trouver autre chose. C’est encore M. Haentjens qui, à propos d’un crédit de plus en plus extraordinaire demandé pour l’Exposition d’Amsterdam a fait remarquer que ce crédit est le troisième pour le même objet. Il offre entre autres cette particularité bizarre que le second n’est pas encore voté. Ces demandes par séries sont, el aussi, un truc peu loyal. Quand les ministres craignent que les Chambres ou l’opposition ne trouvent une dépense exagérée, ils la réduisent au quart ou au cinquième, parfois plus bas ; puis ils formulent une demande infinitésimale en promettant que le crédit voté suffira. Naturellement il ne suffit pas. Les mêmes ministres exigent alors un premier supplément, un second, un troisième ; il n’y a plus de raison pour s’arrêter. Comme les dépenses sont engagées, il faut bien les subir. Il arrive souvent que le crédit principal ne signifie plus rien devant l’énormité des suppléments. Ce truc est moins usé que celui des crédits extraordinaires ; il réussit encore très bien. Il a donné surtout des résultats remarquables dans l’affaire tunisienne.
A propos de la Tunisie, on a encore voté, toujours avec discussion immédiate, les frais de l’organisation judiciaire de ce charmant pays. Ce n’était pas la peine de faire deux projets séparés pour les adopter à vingt-quatre heures de distance. M. des Rocours n’a pas envoyé dire ses vérités à M. Ribot, le complaisant rapporteur d’une commission non moins complaisante.
Entre temps, on a voté le projet sur la caisse des écoles, déjà revenu du Sénat. Les retouches insignifiantes que l’on s’est permis de faire au Sénat n’ont pas plus effarouché la Chambre qu’elles ne gêneront M. Ferry. M. le Provost de Launay l’a dit fort sagement : l’intervention du conseil d’Etat comme juge des difficultés soulevées par cette loi n’offre aucune garantie sérieuse.
On réalisera le fameux programme des |700 millions, et, comme l’appétit du minotaure laïque s’augmente en mangeant, il pourra sans doute aller jusqu’au milliard. Après avoir subi un monologue fort ennuyeux de M. Sourigues, on a voté en première lecture un projet de loi relatif à la négociation des valeurs mobilières. On a voté bien d’autres choses encore : 20.000 fr. pour solder les frais de l’enfouissement de feu Gambetta; 10.000 fr. pour les funérailles du brave général Chanzy (nous aurions préféré la proposition contraire), une pension exceptionnelle en faveur de Mme Chanzy, etc... Mais il nous semble bien inutile d’entrer plus avant dans le détail de cette séance faite de mauvaises pièces et de morceaux médiocres.
Georges Huilland.


La Chambre haute n’a tenu hier qu’une séance très courte. La discussion ne nous a rien offert qui fût le moins du monde palpitant. L’ordre du jour était presque dérisoire; quatre projets de loi d’intérêt absolument local y figuraient et l’occupaient sans rivaux. Ils ont été votés en un tour de main. M. Barthélémy Saint-Hilaire est alors monté à la tribune, apportant sur le bureau la proposition relative à l’organisation du service judiciaire en Tunisie, proposition mal équilibrée, votée l’autre jour par le Sénat et que la Chambre lui renvoyait hiér, avec le refus d’accepter les modifications que nos pères conscrits avaient cru devoir introduire dans le texte primitif. Le « traducteur » d’Àristote a conseillé à ses collègues de s’incliner devant la décision de MM. les députés, naturellement! Ge conseil MM. les sénateurs, malgré l’opposition très justifiée de M. de Gavardie, se sont empressés de le suivre naturellement! Le palais du Luxembourg sera-t-il. orné d’un ascenseur, s’élevant jusqu’à la salle des délibérations? Nous ne le saurons qu’après Pâques. En dépit des efforts de M. ’Tèstelin, la Chambre haute a décidé qu’elle ne statuerait sur cette question qu’au mois de mai. Pour mettre le peuple souverain en goût, le Citoyen et la Bataille publie, à l’occasion de l’anniversaire du 18 mars, une double feuille commémorative de cette journée. À la première et à la quatrième page figurent des dessins ^présentant la prise des canons de Montmartre, le méurtre des généraux Lecomte et Clément Thomas, t divers épisodes de la lùtte entre les usurgés et lés troupes. Les honneurs de cette illustration sont pour le brave et malheureux général Lecomte, dont l’assassinat est rappelé comme un des principaux titres de gloire du « peuple» vainqueùr. Une longue histoire du 18 mars remplit le journal. C’est la glorification la plus violente de. rin- ^uroèntiôn^-eüinffi et de ses excès. Ce numéro exceptionnel est destiné aux. « frères et amis » ; il s’adresse surtout aux soi-disant conservateurs et aux républicains officiels qui, depuis douze ans, ont conduit les événements au point où ils en sont aujourd’hui. Pour le 12° anniversaire de la Commune, un journal illustré de l’insurrection du 18 mars paraît publiquement à Paris en l’honneur de ce sinistre événement; en même temps,toute la police et toute l’armée sont sur pied pour protéger la rue, les maisons et les monuments publics contre une nouvelle insurrection. Les Chambres ont retardé leurs vacances pour soutenir le gouvernement, le gouvernement tremble derrière l’armée, et l’armée ne paraît sûre que derrière la police. L’àiarme est générale à Paris et dans toute la France. Que se passera-t-il? Peut-être rien. Le douzième 18 mars n’aura été qu’une journée de peur. Mais telle est la situation, que la peur peut produire les mêmes effets que le danger. La république e’n est réduite à trembler tous les jours pour :elle-, même et pour l’ordre public. Sa politique sera désormais la politique de lai peur. Est-ce là un gouvernement? Et la France a-t-elle de quoi se féliciter d’être en république? La Pall Mail Gazette publie la dépêche suivante émanant de YExchange Telegrapk-Company : Vienne, jeudi. La Russie a proposé aux autres puissances européennes de prendre part à l’établissement d’une police internationale de sûreté pour combattre les organisations secrètes de tous genres : anarchistes, nihilistes, fenians, etc. I^e projet a été communiqué : il est basé sur le principe que le nihilisme et le socialisme sont des crimes de droit commun. La France, la Suisse et l’Autriche ont donné leur adhésion au principe de l’alliance antirévolutionnaire. Nous ne savons ce qu’il en est du fond même de la nouvelle, mais elle paraîtra fort invraisemblable en ce qui concerne la France, dont les gouvernants, étant eux-mêmes des révolutionnaires, ne verront probablement pas rechercher, et peuvent difficilement donner leur adhésion à une ligue qui, si elle existait réellement, les viserait, eux, les premiers. Le conseil d’Etat vient de rendre un arrêt en matière scolaire, à propos de la loi du 18 mars. Etant donné le tribunal, on ne sera pas surpris d’apprendre que cet arrêt a pour but de venir en aide aux persécuteurs. Rappelons brièvement les faits. On se souvient que la commission scolaire de Lavaur (Tarn) avait admis comme justifiée l’absence répétée à l’école communale du jeune Deymès, fils d’un charpentier de Lavaur, sur les observations du père qui donnait pour raison l’usage dans cette école de manuels d’instruction morale et civique de MM. Gompayré et Paul Bert, députés. Le ministre de l’instruction publique a déféré cette décision au conseil d’Etat, qui vient de rendre l’arrêt suivant : Le conseil d’Etat, Sur la recevabilité du recours: Considérant qu’aux termes de l’article 9 de la loi du 24mai 1872 « le conseil d’Etat statue souverainement... sur les demandes d’annulation pour excès de pouvoirs for^ mées contre les actes des diverses autorités administratives »; Considérant que les commissions municipales scolaires, instituées par la loi du 28 mars 1882, pour surveiller et encourager la fréquentation des écoles, exercent des attributions d’ordre administratif pour l’exécution de la loi précitée; Que, d’autre part, il appartient au ministre de l’instruction publique, chargé de .veiller à l’observation des lois et au maintien des compétences parmi les autorités ressortissant à son département, de poursuivre l’annulation des décisions qu’il croirait entachées d’excès de pouvoir; qu’ainsi le recours dudit ministre contre la décision ci-dessus visée de la commission municipale scolaire de Lavaur est recevable; Au fond ; Sur le moyen tiré de ce que la commission aurait fait procéder à des débats publics sur la demande d’excuse présentée par le sieur Deymès; Considérant qu’en l’absence des dispositions spéciales de la loi il n’appartient pas aux corps administratifs d’ordonner la publicité de leurs séances, qu’aucune disposition de la loi du 28 mars 1882 ne prescrit ni n’autorise la publicité des séances dans lesquelles les commissions scolaires exercent leurs attributions ; qu’ainsi, en procé-, dant à des débats publics sur la question d’excuse qui lui était soumise par le sieur Deyniès, la commission scolaire de Lavaur a statiié en dehors fies formes prévues par la loi .et que sa décision doit être annulée de ce chef; Sur le moyen tiré de ce que la commission aurait statué sur un objet étranger fr ses attributions ; “ Considérant que l’article 10 de la loi du 28 mars 1882 dispose ; « Les motifs d’ab-y. ■ ^—: - — ->.■ senpe seront soumis à la commission scolaire; Les seuls motifs réputés légitimes • sont lès. suivants : maladie de l’enfant, décès dun membre de la famille, empêchements ^résultant de la difficulté accidentelle des * communications.. Les autres circonstances , exceptionnellement invoquées, seront également appréciées par la commission; » ,.;X3onei4érmitique-si, par application duditarticle, Tes commissions scolaires statuent sur les cas d’excuses personnelles invoquées par l’enfant ou par sa famille, aucune disposition de loi ne leur donne qualité pour contrôler les matières ou les méthodes de l’enseignement et ne les autorise à accueillir des demandes d’excuse fondées sur des appréciations de cette nature ; Considérant que l’excuse du sieur Deymês, telle qu’elle a été formulée devant la commission, se fondait uniquement sur la nature de renseignement donné et des livres employés dans l’école ; qu’en accueillant cette excuse, la commission s’est immiscée dans des affaires étrangères à ses attributions ; qu’elle a ainsi excédé sa compétence et commis un excès de pouvoirs, Décide : 7 Art. lor. — La décision susvisée de la ‘ commission municipale scolaire de Lavaur, en date du 15 décembre 1882, est annulée pour excès de pouvoirs. Cet arrêt appelle plusieurs observations, qui seront, avec toute l’étendue désirable, exposées en leur temps. Pour aujourd’hui, nous nous bornerons à quelques brèves remarques. Et, d’abord, on ne trouve nulle part dans la loi, et la discussion qui en a été faite, contredit absolument l’assertion d’après laquelle les com-Tnisstons scolaires exerceraient des attributions d’ordre administratif. Il va de soi, au contraire, que ce tribunal sai generis prononçant des décisions qui peuvent entraîner des pénalités, et même pouvant ordonner directement des pénalités, comme est, par exemple, l’affichage, exerce par là même des attributions d’ordre judiciaire. Il s’ensuit que la juridiction d’appel devrait être non le conseil d’Etat, mais la cour de cassation, ce qui fait qu’en droit et sous un gouvernement autre que celui-ci, l’appel du ministre de l’instruction publique ne serait pas recevable. En ce point, l’arrêt du conseil d’Etat viole donc les principes. 11 ne les viole pas moins en soute- ■ nant que les débats des commissions scolaires ne doivent pas être publics, parce que cette publicité n’est pas inscrite dans la loi. En effet, le silence même de la loi indique qu’on doit s’en référer sur ce point aux principes généraux. Or il est de principe qu’on ne juge pas à huis-clos, et tout accusé a le droit de réclamer cette garantie de la publicité des débats. Nous’n’insistons pas sur cette partie de la décision du conseil d’Etat qui refuse aux commissions scolaires le droit de tenir compte de la nature des manuels scolaires dans l’appréciation des excuses. Ici encore le conseil d’Etat ne tient pas compte de la loi elle-même qui prévoit « d’autres circonstances exceptionnellement invoquées » que- celles qui sont énumérées à l’article 10. Mais, en notant ce point, nous pouvons le négliger, car cette décision n’empêchera pas, en fait, les commissions scolaires de suivre, quand il leur plaira, le très bon exemple donné par la commission de Lavaur. Il est à remarquer, en effet, que, quel -que soit l’esprit de l’arrêt du conseil d’Etat — et l’on vient de voir quel il est — cet arrêt ne saurait empêcher en rien la continuation des actes de résistance auxquels il prétend s’opposer pour l’avenir. C’est ce dont le Parlement lui-même est obligé de convenir. Voici ce qu’il dit : Les diverses pénalités édictées par la loi contre le père de famille récalcitrant ne peuvent èir.d appliquées qu’après un premier avertissement de la commission scolaire. Croit-on la commission de Lavaur disposée à infliger cette remontrance au père de famille qu’elle absolvait naguère ? Le conseil d’Etat peut bien annuler les décisions de la commission scolaire, mais non lui en imposer d’autres. Avant comme après l’arrêt que nous venous de rapporter, le père de famille continuera à ne point envoyer son enfant à l’école. La décision du conseil d’Etat est un acte purement platonique. Nous retenons cet aveu. Même si les arrêts du conseil d’Etat avaient, en l’espèce, des conséquences tout autres, ce n’en serait pas moins un devoir pour les parents chrétiens de continuer une résistance dans laquelle une question de conscience est engagée; mais dans le cas qui nous occupe, ce qu’ils encourent, c’est un blâme « platonique » du conseil d’Etat. Qui ne tiendrait à honneur de le mériter? Auguste Rqusssu La célèbre explosion de Glerkenwell qui provoqua en 1867, de l’autre côté de la Manche, un tel soulèvement d’opinion contré les Irlandais, a désormais ufrpendant. AvanVnier soir, vers neuf heures, les^ habitants du centre de Londres étaient mis en émoi par une épouvantable détonation qui ébranlait tout un quartier, faisait au loin trembler les maisons et jusqu’à l’inviolable édifice du-Parlement, et jonchait le sol des rues, à un kilomètre à la ronde, de vitres brisées. Fort heureusement, il n’y a pas eu mort d’hommes comme lors de l’explosion de Clerkenwell, et si t^uel(jues voisins du théâtre |e Vexplgsion ont été terriblement épouvantés, il n’y a eu du moins aucun accident grave à déplorer. La partie des bâtiments de l’Etat qu’on a fait sauter (1) se composait d’un édifice en construction, au centre d’un véritable pâté d’« offices gouvernementaux », et si véritablement l’explosion a été causée par lar-malveillance; l’inachèvement ’ des bâtiments explique qu’il n’y ait point eu de factionnaires pour les garder comme sont gardés tous les édifices publics de Londres. On ne sait encore rien des causes de l’explosion, mais nos voisins es^ timent que c’est la réplique des fénians à M. Gladstone, lequel répondait à M. Parnell, il y a trois jours, qu’il était inutile de demander des modifications dans l’application du Land ad, que la question irlandaise ne serait pas rouverte de sitôt et qu’il espérait que M. Parnell s’opposerait désormais à toute agitation contraire aux lois. L’hypothèse des journaux de Londres peut être vraie, et il faut bien dire qu’elle a pour fondement le langage de Ylrish World, le journal fenian d’Amérique, qui revendique cyniquement pour lui et ses amis le mérite d’une campagne à la dynamite contre le Saxon détesté. C’est là le très vilain côté de la question irlando-américaine; mais ni en Angleterre ni en Irlande on n’ignore les criminels desseins et la criminelle propagande des sociétés secrètes, et les journaux anglais manquent de logique et de bonne foi quand ils veulent charger M. Parnell et le parti irlandais des crimes de ces sociétés, qui n’ont rien ménagé pour contrarier et faire échouer la campagne des vrais patriotes de l’Irlande. Il ne faut pas oublier que M. Gladstone et l’Angleterre ne sont point sans une grande part de responsabilité dans les crimes qui se commettent, nous dit-on, au nom de la cause de l’Irlande. Une Irlande soumise et résignée n’a droit qu’au plus parfait mépris de sa puissante voisine. Déjà, du temps d’O’Connell, lord Anglesea disait qu’il fallait agiter l’Irlande pour arracher une concession à l’Angleterre. M. Gladstone lui-même a confessé un jour que l’explosion de Clerltenvell avait « mis la question irlandaise au rang des questions pratiques de la politique ». Mais on n’entretient pas l’agitation chronique chez un peuple longtemps opprimé sans y favoriser le développement des sociétés secrètes; nos voisins récoltent donc ce qu’ils ont semé, et au lieu de tant gémir sur la perversité des Irlandais, ils feraient beaucoup mieux de lui rendre son indépendance. Justement le Times écrivait hier, à propos de la nouvelle explosion, que les Irlandais feraient bien de prendre garde, qu’ils avaient enfin lassé la patience de l’Angleterre, que le peuple anglais était absolument dégoûté de l’Irlande et des Irlandais. Hélas ! il y a longtemps que les Irlandais sont dégoûtés de l’Angleterre, et c’est d’ailleurs leur plus grand tort. Enfin il sortira peut-être un bon résultat de la panique d’avant-hier. Un journal républicain du soir annonce que M. Gladstone, effrayé de ce nouvel attentat, doit proposer aux puissances continentales un contrat international excluant du bénéfice de l’hospitalité tous les criminels apôtres de la dynamite. Il n’y a qu’à généraliser un peu ce bon mouvement, à refuser à tous le criminels politiques, incendiaires ou assassins, les bienfaits du droit d’asile, à empêcher en un mot l’Angleterre d’être le refuge de tous les malfaiteurs du continent, et alors il ne faudra pas trop se plaindre de l’explosion d’avanthier à Londres. On lit dans le dernier numéro de la Semaine religieuse de Beauvais :1 Un journal calholique, YUnivers, a ouvert récemment une souscription très digne du sympathique intérêt de tous* les vrais catholiques : c’est le Denier du Culte, destiné à rendre aux desservants l’allocation ou mieux l’indemnité connue sous le nom de traitement et supprimée par décision ministérielle. Le nombre des curés ainsi frappés est déjà. ’ considérable ; dernièrement onze prêtres du diocèse d’Annecy étaient d un seul coup privés de tout moyen de subsistance ; un de nos honorables et de nos plus chers confrères du diocèse est l’objet de la même rigueur. La charité chrétienne viendra sans aucun doute soutenir et consoler ces victimes du devoir. Le total atteint dès les premiers jours de la souscription en est une preuve manifeste. Mgr l’archevêque de Sens vient d’adresser, à son retour de Rome, une lettre pastorale à son clergé. LaiSemaine religieuse du diocèse, après en avoir donné un extrait, ajoute ce qui suit : Nous croyons devoir nous borner à cet extrait. A la fin de cette lettre, qui ne doit pas être lue en chaire, Monseigneur donne à MM. les curés, relativement h certains livres au sujet desquels s’est fait beaucoup de bruit,"des avis empreints de.oette haute prudence qui distingue notre vénéré archevêque. On lit. dans la Semaine religieuse de Dijon : (i) Les derniers détails disent qu’une seule pièce dans un êdi&oe qui en contient un millier (onç^wm afone thousand) a véritablement été fruité. Comme toujours, les journaux anglais ont WlffQu exàçéré» . . , i • Mgr l’évêque a adressé à son clergé une circulaire, en date du 20 février, au sujet des Manuels d’instruction civique. Notre vénérable prélat, relatant la condamnation portée par la sacrée,congrégation de l’Index contre quatre de ces manuels, insiste auprès de MM. le curés sur le caractère dangereux qu’ils présentent au regardée Ta fûi~de oeux-auxquels ils s’adressent. Il leur recommande donc de faire tout leur possible pour émpêcher qu’ils ne soient mis entre les mains de leurs paroissiens, et surtout des enfants des écoles. Sa Grandeur recommande à ses prêtres de procéder en cette matière avec toute la prudence et la patience qu’imposent les circonstances présentes, et spécialement de ne point en traiter du haut de la chaire. Pour les guider dans l’accomplissement de ce devoir, Sa Grandeur a joint à sa circulaire une consultation théologique résumant brièvement les principes à appliquer et indiquant, les. tempérâments que la prudence et la charité autorisent à y apporter, suivant les cas. Y!Echo de Notre-Dame de la Garde a reçu de l’évêché le communiqué suivant : L’Echo de Noire-Dame de la ytGarde a publié, dans son numéro du 21 janvier dernier, le décret de la S. Congrégation de Tlndex portant condamnation des manuels de morale civique de MM. J. Steeg, G. Compayré, P. Bert, et de Mme Henri Gré ville. Cette condamnation a soulevé plusieurs questions pratiques qu’il est nécessaire de résoudre^ En cqnséqyepQe* ses fonctions pastorales obligent de veiller au maintien de la foi dans son diocèse et particulièrement dans l’âme des entants, a réuni messieurs les curés de la ville et messieurs les curés des chefsTieux de canton du diocèse. S’inspirant des principes de la théolegie, il leur a tracé les règles de conduite à observer soit h l’égard des instituteurs, soit à l’égard des élèves et de leurs parents, pour les écoles oü seraient adoptés, comme livres classiques, les manuels déjà condamnés ou tout autre manuel contenant des propositions- con-* traires à la foi catholique. Comme ces règles ont été résumées avec autant de précision que de sagesse dans l’admirable lettre de S. Em. le cardinal Guibert, archevêque de Paris, et qui a été reproduite par l’Echo dans son numéro du 18 février dernier, messieurs les curés ont été invités à se bien pénétrer des instructions qu’elle renferme et à les prendre com* me direction de leur conduite. Messieurs les curés des chefs-lieux de canton ont été chargés de transmettre ces. avis aux* curés de leurs districts, dans la prochaine réunion du cas de conscience. Il est utile de rappeler à cette occasion que, d’après les règles de l’Index, il est défendu, sous peine de péché grave, d’acheter, de lire, de garder ou de prêter les livres que celte congrégation a condamnés. Mgr Mermillod La nomination de Mgr Mermillod à l’évêché de Lausanne et Genève produit en Suisse une joyeuse émotion parmi les catholiques. La Liberté de Fribourg, qui paraît enguirlandée, dit en annonçant la nouvelle : Mgr Mermillod apporte a* siège de Lausanne et de Genève les mérites d’un confesseur de la foi, les souffrances de vingt ans de persécution, la gloire incomparable dont.il jouit dans tout le monde catholique le prestige de ses grandes œuvres et de ses grands talents. Nous serons fiers à Fribourg de posséder l’exilé de Fernex, l’orateur des grandes chaires, l’héritier de l’habileté de saint François de Sales da»js la direction des âmes. Par notre resi^cl par notre attachement filial, nous ferons oublier à notre nouvel évêque tant de dures années de bannissement, el nous soutiendrons par beaucoup d’amour et de déférence des torces que tant do fatigues et d’épreuves ont entamées, afin que Dieu lui donne les années d’un long et fructueux épiscopat. Le président du gouvernement de Fribourg a reçu la dépêche suivante : Homo, tb mars, 6 h. 40, e. Président conseil d’Etal, Fribourg Le Saint-Père m’impose fardeau épiscopal Lausanne et Genève ; il vous fait écrire décision. Comptez sur mon dévouement. J’ose espérer votre concours. Léon XIII bénit gouvernement et peuple avec affection. ^ Gaspard, évêque* Voici la réponse du gouvernement de Fribourg : - Fribeurg, i6 mars 1883. Monseigneur Mermillod, évêque de Lausanne et de Genèvey Rome Conseil d Elat.de Fribourg remercie Voire Grandeur de bienveillante communication. Lui offre assurance de respect, d’affection et concours dévoué, prie d’exprimer à Sa Sainteté sa reconnaissance et celle du peuple fribourgeois, Théraulaz, président* ; Le cercle catholique de Fribourg’, ayant eu connaissance de la préconisation de Mgr Mermillod, s’est fait.un devoir de lui exprimer sans retard ses sentiments de déférence et de soumission filiale. Voici le texte de la^ dépêche expédiée le 15, à 4 heures après midi. .Monseigneur Mennülody évêque de Lausanne et de Genève, 113, via Quattro Fontane7 Rome. ••• ** Cercle ^ catholique Fribourg reçoit avec joie indicible nouvelle préconisation. Promet obéissance filiale, affeetion sincère, entier dévouement^ h Fillustre confesseur. Heureux retour à l’exilé. Régnent paix, justice, vérité sur patrie çfiérie, par Fribourg, canton prédestiné selon Nicolas de Flüe. Pour le cercle catholique : L: Wuuleret, président* secrétaire^,.