Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/115

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matin, avec Dora et Flora, que je rencontre « comme par hasard ». Le soir nous nous retrouvons au Maiden, car je ne passe plus que deux heures par jour à mon usine, juste le temps de vérifier le travail et de donner des ordres.

Dora a commencé mon portrait. En outre, elle fait à chacune de nos séances, comme intermède à nos plaisirs, un tas de petits croquis suggestifs : nous inventons des positions bizarres qu’elle enlève avec une maëstria étonnante, et dont elle fait des dessins pleins de vie (sans jeu de mots).

Elle m’a promis de me donner son album comme souvenir. Parfois confiant le crayon à Maud, qui dessine presque aussi bien, elle vient compléter le groupe, ce qui donne à l’artiste des distractions qui se traduisent en faux traits et en mouvements impossibles. Dora se fâche alors, et Maud envoie promener album et crayons, mais avec tant de gentillesse que son sévère professeur ne peut tenir longtemps contre ses caresses et rectifie patiemment les fautes de l’écolière.

Cette petite a des idées d’une incroyable drôlerie. Avant-hier, nous étions tous réunis chez moi. Il y avait même la petite Amalla qui porte la boîte de couleurs de Dora, et avec laquelle nous ne nous gênons plus.

Étendus sur la chaise longue, Flora et moi, nous nous reposions après une « séance » et sirotions un verre de limonade ; Maud grignotait des fruits ; Amalla jouait dans un coin : Dora avait simplement un peignoir ouvert. Nonchalamment étendue sur une chaise basse, elle avait, pour dégager son front, rejeté sa longue chevelure dorée entièrement défaite par-dessus le dossier de la chaise, de sorte que l’extrémité en touchait le sol : elle fumait une cigarette, les yeux à demi fermés.

Tout à coup nous voyons Maud s’approcher de Dora par derrière, prendre et soulever ses cheveux dénoués, les étaler et les manier un instant, sans que notre belle amie, qui

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