Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/93

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qu’elle se mit à sucer. Mais celle-ci se leva en se rajustant, et nous dit : « Mes enfants, ne nous échauffons pas. Il me semble, cher ami, que vous n’êtes guère pressé de voir mes œuvres ».

— Pardon, chère amie, mais que puis-je voir de plus joli que ce que vous m’avez montré ?… Mais dites-moi, en lui désignant Amalla du coin de l’œil, est-ce que ?…

Elle me devina, et me répondit à l’oreille : « Tu es bien curieux !… Eh bien ! oui, là… es-tu content ?… Il faut bien qu’elle me serve à quelque chose… Je t’assure qu’elle a une petite langue fort habile. »

— Et vous, Dora, est-ce que vous lui rendez la pareille ?

— Indiscret !… Non, jamais avec la bouche ; mais quelquefois avec le doigt, quand je suis bien contente d’elle… C’est sa plus grande récompense. Figure-toi qu’il y a huit jours, Maud était venue prendre sa leçon de peinture. J’achevai un travail sans m’occuper d’elle, quand un léger bruit me fit lever la tête, et je vis dans un coin de l’atelier, ma Maud et Amalla, étendues toutes deux sur la natte, les mains passées sous leurs jupes, qui… se branlaient. J’allais me fâcher, mais leur position était si drôle, elles avaient l’air si absorbé dans leurs exercices, que j’éclatai de rire et leur criai : « Ne vous gênez pas, polissonnes !… »

Elles se gênaient si peu, que presque aussitôt leurs soupirs simultanés m’annonçaient la fin de leur amusement.

Dora me montra ensuite ses dessins, ses aquarelles vraiment fort belles : marines, paysages, portraits, etc.

— Ne me donnerez-vous pas un souvenir, ma chérie ?… Je serais si heureux de rapporter à Cécile quelque chose de vous !…

— Tout, mon ami, tout ce que tu voudras. Prends !… tout ce que j’ai est à toi…

Et avant que j’eus le temps de la remercier, elle ajouta : « Mais tu n’as pas tout vu !… »

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