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Page:Abbé du Prat - Vénus dans le cloître ou la Religieuse en chemise, 1920.djvu/114

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Agnès. — Assurément. Ah ! Dieu ! qu’il est ingénieux à inventer de nouveaux plaisirs à une âme saoule et dégoûtée ! De quelles pointes et de quels aiguillons ne se sert-il pas pour réveiller la convoitise la plus endormie, la plus languissante, et celle même qui n’en peut plus ! Que d’appétits extravagants ! que d’objets étrangers et que de viandes inconnues il présente ! Mais je vois bien que je n’y suis pas encore si savante que toi.

Angélique. — Hélas ! mon enfant, la science que tu ambitionnes ne pourrait que t’être préjudiciable. Il faut que les plaisirs que nous nous proposons soient bornés par les lois, par la nature et par la prudence, et toutes les maximes dont ce livre pourrait t’instruire s’éloignent presque également de ces trois choses. Crois-moi, toutes les extrémités sont dangereuses, et il est un certain milieu que nous ne pouvons quitter sans tomber dans le précipice. Aimons, il n’est pas défendu ; cherchons la volupté tant qu’elle est légitime, mais évitons ce qui ne peut être inspiré que par la débauche, et ne nous laissons point séduire par les persuasions d’une éloquence qui ne nous flatte que pour nous perdre, et qui ne s’exprime bien que pour nous porter plus facilement au mal.

Agnès. — Oh ! la belle morale ! et que tu sais bien dorer la pilule quand il te plaît ! Ce n’est pas que je ne me rende à tes raisons, et que je ne blâme toutes les choses que tu condamnes, mais