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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

nes pour l’Innarya, plutôt que de lui causer à la fois un chagrin et un dommage.

Il m’écoutait bouche béante, riait, regardait nos gens, enfin il m’embrassa.

— Merci, mon enfant ! que Dieu te fasse voir les fils de tes fils, et, quand tu seras vieux, qu’on s’incline devant tes désirs comme tu t’inclines devant ceux d’un vieillard déchu comme moi ! C’est que, vois-tu, ce prince est un honnête chrétien, intelligent, généreux. Figure-toi bien que tu n’as vu jusqu’à présent que des bandits ; tu verras en lui un véritable prince. Cette maison de Gouksa est une caverne d’usurpateurs, de renégats ; celle de Guoscho-Zaoudé est bâtie sur la tradition, le droit, la justice. Je tenais à ce que tu pusses emporter une idée favorable de ce qu’a été notre malheureux pays.

Et se tournant vers mes gens :

— Vous verrez, vous autres, comme nous allons être bien reçus. Ne craignez rien ; c’est ici tout près, un sentier en plaine et des sources partout.

Jusqu’à mon drogman, tous nos gens étaient gagnés par sa joie.

Quant à moi, j’avais refusé à deux reprises de connaître le Dedjadj Guoscho ; je croyais inutile de me présenter devant lui, et cependant je devais partager si longtemps son orageuse destinée !…..