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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

continue les preuves de son retour à la vie ; elle chercha à rassurer son aumônier et ses suivantes, se fit soulever, demanda l’absolution et me dit, pendant qu’on la remettait sur sa couche :

— Hélas ! Mikaël, que nous sommes peu de chose !

Le prêtre pleurait de joie, bénissait sa pénitente, et la bénissait encore, les autres se répandaient en actions de grâces. Je dus les engager à contenir leurs manifestations, par ménagement pour leur maîtresse ; j’indiquai quelques soins à donner, et malgré l’opposition aimable de la malade, je la quittai pour aller confirmer au Prince l’heureuse nouvelle que je lui avais déjà envoyé porter par un eunuque.

La nuit était avancée ; beaucoup de gens veillaient sur la place, accroupis autour de grands feux ; la bonne nouvelle circulait déjà parmi eux, et je jouis à mon passage de l’heureuse impression qu’elle leur causait, car la Waïzoro était aimée de tous.

Je trouvai le Prince, son chapelet à la main ; sa physionomie s’éclaira de joie, lorsque je lui dis que je lui apportais le bonsoir de la part de sa femme, qui avait complètement repris ses sens, et qui le priait de se rassurer sur son compte.

La Waïzoro eut encore quelques évanouissements, mais la semaine n’était pas écoulée qu’elle entrait en convalescence. Ses gens ne voulaient plus rien faire sans mes avis ; le digne aumônier venait à tout propos me chercher jusque chez le Prince, pour me mener auprès d’elle, et comme je parlais assez couramment l’amarigna, je pus goûter les charmes de la conversation de cette femme, qui eût été remarquable en tout pays.

Les préparatifs de départ furent repris ; les notables de la frontière chargés d’intercepter les communica-