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DOUZE ANS DE SÉJOUR

mais l’ennemi se dirigea de façon à nous en interdire l’accès. Huit des nôtres se dévouèrent pour l’arrêter au moins quelques instants ; il détacha contre eux une quinzaine d’hommes et continua à toute bride dans la direction du Prince. Nos huit cavaliers étaient à peine engagés, que tous nos adversaires tournèrent bride et prirent la fuite. L’apparition subite de plus de deux cents de nos cavaliers venait de les surprendre autant que nous : c’était le vigilant Ymer Sahalou qui, ayant vu l’ennemi, arrivait à point pour nous dégager. Nos adversaires, excités par la vue du gonfanon du Dedjazmatch, étaient tellement préoccupés de la riche proie que nous leur offrions, qu’ils ne s’aperçurent de l’approche d’Ymer que juste à temps pour lui échapper à grand’peine et disparaître sous bois. Encore un peu ils eussent enlevé le Dedjazmatch ; car plus de la moitié de son escorte était composée de chefs âgés, déshabitués des coups main depuis leur accession à des postes élevés. Nos huit cavaliers, dont le dévouement contribua pour une bonne part à nous éviter cette disgrâce, n’eurent que deux chevaux blessés.

En accourant à notre secours. Ymer avait expédié des cavaliers pour avertir nos picoreurs de l’approche de l’armée ennemie. Il avait également fait prendre une tente : quatre cavaliers la portaient par les quatre coins. À tout événement, elle fut dressée immédiatement comme point de ralliement. Nos gens du camp nous rejoignirent pêle-mêle, et nous ne tardâmes pas à voir un gros corps d’infanterie sur le couronnement d’un petit deuga en face de nous : c’était la tête de l’armée ennemie. La bataille allait être inévitable.

Heureusement le cri d’alarme des messagers d’Ymer, répété d’éminence en éminence, avertissait