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DOUZE ANS DE SÉJOUR

les vivants, mais surtout entre les vivants et leurs ancêtres. Du reste, quand on est initié à leur vie intime, on est journellement frappé des effets plus souvent bienfaisants que nuisibles de ce sentiment. L’Afrique orientale a servi de lieu d’établissement à plusieurs races, mais la grande majorité se rattache à la famille sémitique, d’après les caractères fournis par leurs idiômes, leurs langues, et, comme il a été dit, d’après leurs traditions. Cette origine suffirait seule à expliquer l’objection persistante des indigènes à la dénomination de Habechi.

L’adjectif Habechi, déformé par les Portugais, qui ont mis de côté la première lettre, et, selon leur usage, ont rendu le son ch par x, est devenu ainsi Abexim, en y joignant la finale portugaise ; d’où, en usant à leur tour de la licence de transcription dont les Portugais leur avaient donné l’exemple, les copistes du seizième siècle ont fait le nom Abessinie devenu sans effort Abyssinie. Quelques auteurs allemands emploient encore la dénomination Habesch ; les Anglais écrivent tantôt Abyssinia et tantôt Abessinia. Puis donc que les Arabes et les Européens, les peuples étrangers enfin, n’ont pu s’entendre sur la manière d’écrire une qualification injurieuse, convertie en désignation géographique, il paraît convenable de revenir au nom d’Éthiopie, par lequel tous les indigènes désignent leur patrie.

Quand on sait que ce peuple éthiopien rattache à la Judée ses origines historiques ; qu’il justifie son nom par les textes bibliques, et qu’il pratique le Christianisme depuis le quatrième siècle ; quand on songe que depuis cette époque, son pays a servi de lieu de refuge pour les mœurs et les idées