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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

Après cet aperçu de la configuration du pays, j’essaierai, en suivant les données géographiques recueillies par mon frère, d’en indiquer les frontières. Cette tâche est d’autant plus difficile, que les cartes et les renseignements à cet égard manquent, et que les traditions sont vagues et malaisées à contrôler ; aussi, en cherchant à délimiter le vieil empire d’Éthiopie, j’ai plutôt l’ambition de provoquer des études à faire, que de bien donner les noms et les directions des lignes de frontières, avec la précision que demande la science en Europe. Ce qui excusera d’ailleurs le vague de la délinéation qui va suivre, c’est l’usage des peuples africains de terminer un pays par une frontière indéfinie, mobile, élastique. Un des caractères les plus communs à ces peuples est de chercher l’isolement ; ils semblent redouter de confiner de près avec une nation quelconque, et s’en séparent au moyen de larges frontières formées par des hernes ou terres abandonnées, dont le seul roi est la force, suivant l’expression des indigènes ; si leur puissance s’accroît, ils étendent la culture sur la lisière de ces hernes, ravagent et dépeuplent la lisière opposée, poussant ainsi, pour s’agrandir, le désert devant eux. Les nations voisines usent de représailles, et selon les fluctuations de ces guerres, qui ne finissent quelquefois que longtemps après l’extinction des générations qui les ont commencées, la ligne frontière proprement dite se déplace continuellement ; enfin, la guerre, mal sporadique en Europe, étant endémique sur le continent africain, il en résulte naturellement que les frontières des États sont toujours en état d’expansion ou de rétrécissement. En Éthiopie, les limites indiquées par la nature