Page:Abel Sibrès - Maud.djvu/78

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couloir, frappa légèrement à la porte de droite, qui, presque aussitôt, s’ouvrit et se referma.

Maud entendit un murmure de voix dans la pièce où se trouvait Julie. Puis, vientôit, après avoir frappé un coup discret à la porte qui séparait les deux chambres, celle-ci se présentait devant Miss Strawford en disant :

— Monsieur est là, qui désire voir Madame…

Un nuage soudain assombrit le doux visage de Mary, qui répondit avec effort :

— Qu’il entre…

Et Fredo apparut.

Il s’immobilisa à l’entrée de la pièce et fit signe à Julie de se retirer. Ce ne fut que lorsque la porte se fut refermée qu’il s’approcha du fauteuil où Miss Strawford était restée assise.

— Excusez-moi de vous déranger à pareille heure, Miss… prononça-t-il d’une voix à dessein contenue. Du reste, je n’ai que deux mots à vous dire. Vous savez que Julie va s’absenter. Vous n’aurez donc personne à côté de vous ni cette nuit ni la suivante. Vous n’aurez pas peur ?

— Peur ? répondit la jeune fille avec dignité. Pourquoi aurais-je peur ? Mon honneur et ma sécurité ne sont-ils pas sous la sauvegarde de votre parole, Monsieur ?

Fredo s’inclina.

— Très touché de votre confiance, Miss. Mais vous êtes habituée à sentir cette femme auprès de vous, et une fois seule vous pourriez éprouver cet effroi irraisonné de la nuit auquel sont sujettes certaines natures impressionnables.

— Resterai-je seule dans la maison ?

— Non, Miss. Il n’y a que Julie qui s’absente. Émile et moi passerons comme d’habitude la nuit ici.

— Alors, je serai aussi tranquille que si Julie était là.

— Il me plaît de vous l’entendre dire, Miss. Pour le reste, demain matin, dès que vous voudrez vous lever, vous n’aurez, qu’à sonner comme d’habitude, et la cuisinière montera se mettre à votre disposition.

— Bien, Monsieur.

Comme, après s’être incliné, Fredo s’apprêtait à se retirer, Mary le retint du geste :

— Encore un mot, Monsieur, je vous prie. Il y a trois jours, vous me faisiez entrevoir ma liberté comme proche. Vous serait-il possible aujourd’hui de me fixer une date ?

Fredo ne sourcilla pas.

— Je ne puis que vous répéter ce que je vous disais alors, Miss, répondit-il froidement… Vous serez libre lorsque nous aurons encaissé les fonds que vous savez. La dernière partie de ces fonds est en route et arrive probablement à Paris la semaine prochaine. Quelques jours nous seront ensuite nécessaires.

— Bref, combien me faudra-t-il attendre encore ? Une quinzaine ?

— À peine, Miss. De huit à dix jours tout au plus, à mon avis.

Mary joignit les mains :

— Dix jours… Oh ! mon Dieu… Dix jours, et je serai libre. Vous ne me trompez pas, n’est-ce pas, Monsieur ?