Page:Abelard Heloise Cousin - Lettres I.djvu/251

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Vies des Pères, ôta la prélature à un frère plus ancien dans l’ordre, mais plus jeune, pour la donner à un plus âgé ; sa seule raison était qu’il était son aîné. Il craignait que ce frère, encore engagé dans les liens de la chair, ne souffrit de se voir préférer un plus jeune que lui ; il se souvenait du mécontentement que les Apôtres eux-mêmes avaient éprouvé contre deux d’entre eux, pour qui l’intervention de leur mère avait obtenu quelque privilége auprès du Christ, l’un d’eux, surtout, étant beaucoup plus jeune que tous les autres, je veux dire Jean, dont nous venons de parler.

V. Ce n’est pas seulement dans le choix des diaconesses que l’Apôtre a recommandé le plus grand soin ; on voit à quel degré il pousse l’attention en tout ce qui touche les veuves animées du désir de se consacrer à Dieu ; il veut supprimer pour elles toute occasion de tentation. Après avoir dit : « Honorez les veuves, les véritables veuves, » il ajoute aussitôt : « Mais si quelque veuve a des enfants ou des petits-enfants, qu’elle apprenne d’abord à conduire sa maison et à faire pour ses parents ce qu’ils ont fait pour elle. » Et quelques lignes plus bas : « Si quelqu’un n’a pas soin des siens, et surtout de ceux de sa maison, il renie la foi ; il est plus coupable qu’un infidèle. » Par ces paroles, il satisfait en même temps aux devoirs de l’humanité et aux exigences de la profession religieuse. Il veut empêcher que, sous prétexte de profession religieuse, de pauvres orphelins ne soient abandonnés, et que le sentiment de l’humaine compassion envers des malheureux ne trouble la résolution des saintes veuves, ne ramène leurs regards en arrière, ne les entraîne même parfois dans le sacrilège, et ne les induise à détourner de la communauté pour donner à leurs proches.

Il était donc bien nécessaire d’avertir celles qui sont dans les liens de la famille de commencer par rendre ce qu’elles ont reçu, avant de passer au vrai veuvage et de se consacrer sans réserve au service de Dieu, c’est-à-dire de pourvoir à l’éducation de leurs enfants, comme elles ont été élevées elles-mêmes par les soins de leurs parents. Pour porter plus haut encore la perfection des veuves, l’Apôtre leur recommande de se livrer incessamment à la prière nuit et jour.

Également préoccupé de leurs besoins, il dit : « Si quelque fidèle a des veuves, qu’il les assiste, que l’Église ne les ait pas à sa charge, afin qu’elle puisse secourir les véritables veuves. » C’est comme s’il disait : s’il est des veuves qui aient une famille capable avec ses ressources de subvenir à leurs besoins, qu’elle y pourvoie, afin que les revenus communs de l’Église puissent soutenir les autres. De ces préceptes, il ressort clairement que, s’il en est qui se refusent à secourir les veuves qui leur appartiennent, il faut les contraindre, de par l’autorité apostolique, à s’acquitter de cette dette. L’Apôtre ne s’est pas borné à pourvoir aux besoins des autres, il a voulu assurer les égards qui leur étaient dus : « Honorez, dit-il, les veuves qui sont véritablement veuves. »

Telles furent, sans doute, celle que l’Apôtre appelle sa mère, et celle que