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Page:Abelard Heloise Cousin - Lettres II.djvu/182

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QUESTIONS DHÉLOlSE ET RÉPONSES D’ABÉURD. 419

point. On est coupable de la violer tout entière, et par là même condam- nable, pour ne l’avoir pas tout entière observée*

TROISIÈME QUESTION D’HÉLOÏSE.

Pourquoi le Seigneur répond-il souvent aux questions qui lui sont posées par quelqu’un de ses disciples : « Tu l'as dit, » ou « tu le dis. » et quelquefois même, lorsque plusieurs l’interrompent à la fois : « Vous l’avez dit », comme s’il voulait montrer que ceux qui l’interrompent affirment eux- mêmes ce qu’ils ont l’air de mettre en doute par leur question ? C’est ainsi qu’à 1a question de Judas : « Maître, est-ce moi qui dois te livrer ? » il répond : « Tu l’as dit. » C’est dans des termes semblables qu’il répond au prêtre qui lui demande s’il est le fils de Dieu. Au peuple même qui lui pose cette question : « Si tu es le Christ, dis-le ouvertement, » ou : « Es-tu le Christ ? » il répond : « Vous le dites, je le suis. » Enfin, quand le prési- dent Pilate, lui demande s’il est le roi des Juifs, il répond : « Tu le dis, je suis roi. » Ces réponses ne laissent pas de provoquer quelque doute. En effet, celui qui demande si telle chose est ceci ou cela, ne dit pas, en énon- çant la chose, que ce soit ceci ou cela ; il demande ce qu’elle est, comme un homme qui est en peine.

Réponse d’Abélard.

Ces réponses du Seigneur seraient effectivement de nature à soulever une question difficile et tout à fait insoluble, si, quand le Seigneur répond : « Tu l’as dit, » ou « vous le dites, » ou « tu le dis, » sa réponse se rapportait aux termes de la question, en sorte qu’il eût l’air de déclarer que la réponse est comprise dans la question. Il n’en peut être, et il n’en est point ainsi. Quand donc, à la question de Judas, si c’est lui qui doit le livrer, il répond : « Tu l’as dit, » et non « tu le dis, » il fait allusion au pacte par lequel Judas s’était engagé vis-à-vis des Juifs à le livrer pour une somme d’argent. Au prince des prêtres, lui demandant si le Christ est fils de Dieu, il répond : « Vous l’avez dit, » c’est-à-dire que lui, qui niait alors que le Christ qu’il voyait fût le fils de Dieu, il avait reconnu auparavant et plus d’une fois qu’il était tel, en récitant la loi et les prophètes. Aux Juifs qui lui demandent s’il est le Christ ou s’il est le fils de Dieu, quand il répond : « Vous le dites, » sous la forme d’un temps présent, il fait entendre, comme dans sa réponse à Pilate, que le jour est proche où ils le reconnaîtront. Et lorsque, se mo- quant de lui, ils disaient : « Prophétise, Christ, qui est-ce qui t’a frappé ? » ou bien : « Salut, roi des Juifs ! » ne déclaraient-ils pas qu’il était le Christ, c’est-à-dire l’oint du Seigneur, imitant en cela la prophétie de Caïphe : « Il convient qu’un seul homme meure, et que le peuple tout entier soit sauvé ? • Au témoignage de la foule elle-même, qui le suivait avec des rameaux de palmier, il est le fils de David ; selon saint Mathieu, le royaume de David est venu avec lui ; selon saint Marc, béni est le roi qui est venu ; suivant saint