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QUESTIONS D’HÉLOISE ET RÉPONSES D’ABÉLARD. 435

participant â l’ancienne, non à la nouvelle alliance, pour ainsi dire, ils restaient comme en dehors du royaume de Dieu : la solidité de la foi ne les avait pas encore assez bien confirmés dans l’esprit de Dieu, pour que, renouvelés par cette intelligence, ils méritassent d’être confirmés dans ces sentiments nouveaux comme après une résurrection. Le Christ boira alors avec eux du jus de la vigne, c’est-à-dire de son sang, qui est comme une vigne nouvelle ; et il apaisera ainsi sa soif en ceux qui prendront part au sacrifice de sa Passion dans des sentiments dignes de lui. En effet, celui qui a soif ou qui a faim du salut des hommes est satisfait dans sa soif et dans sa faim, lorsqu’il les voit heureusement remplies.

Peut-être aussi faut-il entendre que le sacrement de la Passion de Notre- Seigneur, ancien avant la résurrection, fut, pour ainsi dire, nouveau après. Le corps du Seigneur étant alors passible, corruptible ou mortel, il était semblable au vieil homme, avant d’arriver, par la résurrection, à la nou- veauté de la vie future. Tant qu’il était mortel, il s’était donné dans le sacrifice tel qu’il était ; le sacrifice était ancien, et non nouveau par rapport au nouveau qui ne s’accomplit plus dans l’humanité, mais dans une immor- talité incorruptible. Ce que saint Luc dit : « Ce calice est mon sang, le sang de la nouvelle alliance, » signifie le pacte de Dieu, la promesse de la Ré- demption faite à l’homme par la Passion. En effet, où nous disons testament, les Hébreux disent pacte ; et effectivement, ceux qui reçoivent la loi du Seigneur forment avec lui une sorte de pacte et Dieu avec eux : ils lui pro- mettent obéissance, il leur promet récompense.

SEPTIÈME QUESTION d’hÉLÏOSE.

Que signifie ce que nous lisons dans saint Luc, que le Seigneur donna à ses disciples deux calices ou deux fois le même calice ? En effet, il est écrit : « Et l’heure étant venue, il se mita table et ses douze apôtres avec lui ; et il leur dit : « J’ai vivement désiré faire la Pâque avec vous, avant de mourir. Je vous le dis en vérité : Je ne mangerai plus de ceci, jusqu’à ce que la volonté de Dieu soit accomplie. Et ayant pris le calice, il rendit grâce et dit : Prenez et partagez entre vous. Car je vous le dis en vérité : je ne boi- rai plus du jus de la vigne, avantque le règne de Dieu vienne. • Et ayant reçu le pain, il rendit grâces, le rompit, le donna, et dit : « ceci est mon corps que je donne pour vous. Faites cela en mémoire de moi. » Et de même pour le calice après le repas : « Ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance. »

Rêpome d’Abélard.

’ La Pâque, que, selon la loi, il avait envoyé ses disciples préparer, c’est- à-dire l’auciennc Pâque, consistait en un repas [de chair d’agneau ou de

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