Page:Abelard Heloise Cousin - Lettres II.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LETTRES D’ABÊLARD ET d’Héloïse.

277

moyen*d’insulter leurs inférieurs, qu’ils écoutent ce qui est écrit : « Ne soyez pas comme un lion dans votre maison, brusquant tous les serviteurs, écrasant ceux qui tous sont soumis : car l’orgueil est également haïssable à Dieu et aux hommes. Le Seigneur renversa les sièges des superbes, et mit à leur place les doux de cœur ; ils vous ont établi leur chef ; nu vous enor- gueillissez point ; soyez parmi eux comme l’un d’eux. » Qu’ils écoutent l’a- pôtre Timothée traçant la conduite à tenir vis-à-vis des inférieurs : « Ne maltraitez pas le vieillard, mais priez-le corn, me votre père ; traitez les jeunes gens en frères, les femmes âgées en mères, les plus jeunes en sœurs. »

« Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, dit le Seigneur, c’est moi qui vous ai choisi. » Tous les autres prélats sont élus par les inférieurs ; ce sont eux qui les nomment et qui les établissent, parcs qu’ils ne sont pas élevés au rang de maîtres, mais de ministres. Dieu est le seul Seigneur véritable ; seul il a le don de se choisir des serviteurs parmi ceux qui lui sont soumis. Cependant il s’est montré plus ministre que maître ; il a confondu par son exemple ses disciples qui déjà aspiraient à l’honneur du premier rang. « Les rois des peuples sont leurs maîtres, dit-il, et ceux qui ont le pouvoir sur eux sont appelés bienfaisants ; mais il n’en est pas ainsi de vous. » C’est donc imiter les rois de la terre que de prétendre à être maîtres plutôt que mi- nistres ; de vouloir se faire craindre plutôt qu’aimer, et, tout enorgueillis de l’autorité de la prélature, de rechercher lu première place à table, le premier rang dans la synagogue, les saints de la foule sur la place publi- que, d’aimer à s’entendre appeler Habbi. Pour nous empêcher de nous glo- rifier de ces hommages et de ces titres, pour nous inviter à rester en toute chose fidèle à l’humilité, voici ce que nous dit le Seigneur : « Ne vous laissez pas appeler Habbi, ne vous laissez pas appeler père sur terre. » En- fin pour nous détourner de toute pensée d’orgueil, il ajo’ilc : « Celui qui s’élèvera sera abaissé. »

Il faut aussi prendre ses mesures pour que l’absence du pasteur ne com- promette pas le troupeau, et que l’observation de la règle n’en soit pas sus- pendue. Nous ordonnons donc que la diaconesse, plus occupée du soin des âmes que de celui des corps, ne sorte jamais du monastère pour vaquer aux affaires du dehors. Kl le veillera d’autant mieux aux besoins des religieuses qu’elle vivra plus assidûment au milieu d’elles, et elle sera d’autant plus respectée des hommes qu’elle se montrera à eux plus rarement, ainsi qu’il est écrit : « Éloignez-vous d’un puissant qui vous appelle ; il vous appel- lera d’autant plus. » Si les besoins du monastère exigent quelque mission, les moines ou les frères convers en seront chargés. C’es-t aux hommes de pourvoir aux nécessités des femmes. Plus la piété des femmes est grande, plus elles sont occupées de Dieu, plus elles ont besoin do recourir à l’assis- tance des hommes. C’est ainsi que l’ange avertit Joseph de prendre soin de la mère du Seigneur, qu’il ne lui fut pas cependant donné de connaître. \f>