Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mule le féminisme intégral : « Dieu, dit-il, ne distingue pas plus entre les hommes et les femmes qu’entre les riches et les pauvres, entre les savants et les ignorants. » « Le soleil luit pour tous, » et pour les deux sexes, même droit à la vie, même droit au bonheur, même droit au plaisir. Brisant le mariage et la famille, formulant en disciple exalté de Platon la théorie de « toutes à tous, tous à toutes », Épipbane émancipe la femme de toutes chaînes.

Les gnostiques ne s’en tinrent pas à la théorie ; de fait les femmes tinrent chez eux une très grande place. Tandis que, suivant les enseignements de saint Paul, la femme est dans l’orthodoxie rigoureusement écartée des offices religieux[1], les gnostiques lui font dans leurs chapelles une large place. Ne sont-ils pas des Orientaux, et partout dans l’Orient la femme ne fut-elle pas prêtresse ? Aussi, dans toute secte gnostique, la femme baptise, officie, préside à la liturgie, prophétise. Elle prophétise surtout, et telle secte, celle des Markosiens, dut, pour une grande part, son développement à ses prophétesses.

À côté de tous les docteurs de l’étrange loi, une femme se tient, disciple ou inspiratrice, « Hélène à côté de Simon, Priscilla et Maximilla à côté de Montanus, tout un cortège de femmes autour de Markos et de Marcia » ; Marcellina qui porta à Rome la bonne parole de Carpocrate, Sigé à qui Markos apprit, pour la terreur des fidèles, à faire bouillonner

  1. Tout au plus elle est diaconesse. Jusqu’au cinquième siècle en Occident, un peu plus tard en Orient, des femmes remplissent les fonctions du diaconat (visite des malades et des pauvres, assistance aux femmes pendant le baptême par immersion pratiqué aux premiers siècles).