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che chez les hérétiques. Chez eux, dans cette gnose où se mêlent de façon si bizarre, parfois si incompréhensible, les enseignements du Christ et ceux de Zoroastre, ceux des prêtres d’Égypte et ceux de Platon, triomphe le mysticisme oriental.

Presque toutes les sectes admettent deux grands principes de vie. À côté du Père céleste, principe masculin, voici un autre principe, féminin celui-là, mais comme lui éternel et incréé, Sigé (le silence). Leur union a produit le monde des idées d’où dérive le monde sensible. Pour expliquer la Création, la Chute, la Rédemption, c’est tout un étrange roman cosmogonique et théologique où la Femme, Sophia, joue le rôle capital. C’est l’amour de Sophia pour Bythos (l’abîme) qui créa la matière et qui, gémissant devant l’imperfection de son œuvre, suscita par ses larmes un premier rédempteur. C’est elle qui, plus tard, créa, par l’intermédiaire de Jéhovah, le monde sensible et envoya le Christ le sauver.

Ainsi voici rendue à la femme sa place auprès du trône du Père. Et ces conceptions ne furent pas, remarque Renan, sans influer sur l’orthodoxie.

La Vierge en prière au pied de la Croix, les gnostiques l’exaltent jusqu’à en faire une émanation directe de la divinité. L’orthodoxie la laissera près du Fils dans les cieux. Et le principe féminin reparaîtra, tempérant l’austérité mosaïque d’affectueuse douceur.

Sur la terre aussi, les gnostiques font de la femme l’égale de l’homme. Le fils de Carpocrate, Épiphane, ce jeune génie de dix-sept ans, auquel ses disciples, après une mort prématurée, élevèrent des autels, for-