Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/77

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tées, participation aux opérations plus ou moins légales des publicains, formation de sociétés pour l’exploitation des ressources de telle ou telle province, commandites des armateurs, les femmes savent par tous ces moyens faire fructifier leur fortune, maintenant indépendante. De ces brasseuses d’affaires, intelligentes et terriblement âpres au gain, Térentia, acariâtre épouse de Cicéron, est le modèle accompli. Il y eut même des femmes banquiers de profession, ce qui montre Rome, à sa belle époque, bien en avance sur l’Europe moderne. À la fin de l’empire, il est vrai, une loi vint interdire aux femmes ce mode d’activité.

À plus forte raison, en un pays où les deux sexes reçoivent des mêmes maîtres la même culture, chacune des neuf muses trouve-t-elle des femmes parmi ses disciples. Nulle poétesse sans doute n’égala Sapho, nulle, parmi celles que nous connaissons (et il faut nous rappeler encore que la plus grande partie de la littérature romaine nous échappe), ne peut être comparée aux grands poètes latins des deux siècles d’or de Rome. Mais assez nombreuses sont celles qui s’acquièrent une réputation. Cornificia, sœur d’un général-poète contemporain d’Auguste, fut, au témoignage peut-être partial de son frère, honorée de toute l’Italie. Praxilla (femme ou fille, on ne sait trop, du précieux poète de l’art d’aimer) est mise par Ovide au nombre de ses meilleurs disciples. Polla Argentaria, femme de Lucain, non contente d’avoir collaboré, dit-on, à la Pharsale, fut célèbre par ses épigrammes. Sulpicia osa, rare courage ! se désigner par ses satires à la haine de Domitien, et trouver pour regretter Rome libre