Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/87

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pour le sexe faible des droits qu’il possède déjà. Tout au plus, quand quelque misogyne prétend ramener la femme à la servitude, un magistrat se lève-t-il pour s’y opposer, mais par quelques mots au plus et sans longues discussions philosophiques.

Quelques penseurs seulement s’élèvent contre un préjugé qui, malgré tout, reste assez commun : l’infériorité intellectuelle et morale de la femme. Sénèque qui, entouré de femmes d’une haute intelligence et d’un grand cœur, Marcia, Helvia, leur a dédié quelques-unes de ses plus belles œuvres, les plus humaines, et montre ainsi quel cas il fait d’elles, affirme que la femme est susceptible de recevoir la même instruction que l’homme. Le stoïcien Musonius Rufus soutient la même thèse, et Plutarque, à qui les longues recherches historiques ont montré de quoi furent capables, au cours des âges, le courage, la patience, l’intelligence, le génie artistique féminin, consacre une de ses œuvres à la démonstration de cette thèse : la femme est aussi vertueuse que l’homme. Son livre La Vertu des Femmes est le premier en date de ces panégyriques dont, suivant ses traces et reprenant ses exemples, d’innombrables femmes et quelques hommes honoreront le sexe opprimé.

Peu de théories féministes donc, mais appuyées de l’autorité des plus grands maîtres de la pensée antique, et surtout, dans le domaine politique et social, une pratique quasi universelle de l’égalité : est-ce là ce que des penseurs, plus préoccupés de soutenir une thèse que d’établir la vérité, appellent l’humiliation de la femme par le paganisme ? N’est-ce pas plutôt, à la fin de la société antique, le libre épanouissement pour la femme de toutes ses facultés ?