Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/150

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d’amener l’apaisement. Vers la fin de sa vie, d’ailleurs, elle prend sur les questions religieuses une position plus nette. Malgré ses efforts pour se faire accepter de l’entourage de la reine, celle-ci, le dauphin, leur cour et tout le parti dévot continuent à mener contre elle une guerre sourde, après comme avant le renvoi du comte d’Argenson. Dès 1757, elle s’est aperçue de l’inutilité de ses tentatives de conciliation et, soupçonnant non sans raison derrière la cabale de la reine et du dauphin, l’influence des jésuites, devient franchement hostile à ceux-ci et aux ultramontains. Un peu avant l’attentat de Damiens, ceux-ci, apercevant combien peut leur être dangereuse la malveillance de la favorite, dépêchent auprès d’elle Mme  de Chiron, porteur de menaces à peine dissimulées.

« Pourquoi, aurait dit à celle-ci une de ses amies, la marquise est-elle opposée aux jésuites ? Je vous assure que toute puissante qu’elle est, elle pourrait s’en trouver mal… Conseillez-lui des ménagements. — Votre amie, repartit la marquise à Mme  de Chiron qui lui rappelait ses paroles, est déléguée par les révérends pères[1]. »

Et poursuivant sa politique de juste milieu, elle conseille, après l’attentat de Damiens, l’exil de l’archevêque de Paris dont l’intransigeance suscite l’agitation parlementaire.

Après l’arrivée au pouvoir du duc de Choiseul qui marque un accroissement du crédit de la marquise[2], le gouvernement laisse le Parlement poursuivre sans obstacle une politique nettement hostile aux jésuites et aux ultramontains.

Quel fut dans la destruction des jésuites le rôle exact de Mme  de Pompadour ? Un historien moderne prétend que la favorite, non plus que Choiseul, n’eut dans cette affaire de rôle actif. L’un et l’autre, dit-il, se contentèrent de laisser faire le Parlement[3]. Et pour ce qui concerne la favorite, cette vue semble confirmée par Sénac de Meilhan[4]. Pour lui, Mme  de Pompadour ne fut pas, au cours de cette affaire, poussée par la haine personnelle contre les jésuites, mais par l’influence de Choiseul.

Le parti dévot, lui, n’en jugea pas ainsi et attribua à la favorite qu’il soupçonnait depuis longtemps d’hostilité à son égard, la persécution.

Au cours de l’examen des constitutions et des débats du procès

  1. Mme  du Hausset. Loc. cit.
  2. Madame n’eut jamais autant de crédit que lorsque Choiseul fut entré dans le ministère. (Ibid.)
  3. Carré. Le règne de Louis XV.
  4. Portraits et caractères.