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Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/347

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Ce n’est pas cependant par leurs écrits que les femmes seront utiles serviteurs de la philosophie. On voit donc que les femmes de lettres se sont essayées dans tous les genres. Et si l’on peut penser, avec raison que, sauf deux ou trois exceptions, elles représentent la quantité plus que la qualité, il faut néanmoins, pour les mettre à leur juste place, et se rappeler la médiocrité littéraire de tant d’écrivains qui furent alors notoires, et se souvenir que leurs contemporains étaient loin, eux, de les trouver médiocres. À plusieurs reprises, on écrit des histoires de la littérature féminine pour « faire voir ce que la femme peut faire dans la carrière des lettres lorsqu’elle sait se mettre au-dessus des préjugés » [1], et à la veille de la Révolution un critique littéraire se demande pourquoi les femmes, dont beaucoup égalent les meilleurs écrivains (en l’espèce Suard et La Harpe), n’entreraient pas tout comme eux à l’Académie[2].

iv. Les femmes de science

L’énumération même complète des femmes de lettres qui fleurirent au xviiie siècle ne donnerait qu’une idée fort imparfaite du rôle tenu par les femmes dans la vie intellectuelle de leur temps.

Universelle, leur curiosité déborde au delà de la littérature proprement dite, vers les sciences déductives et expérimentales, vers les spéculations du mysticisme.

Quelques-unes sont attirées vers la science et acquièrent de leur temps réputation de mathématicienne, d’astronome, de naturaliste. Entre toutes, Mme du Chatelet est la plus célèbre. Passionnée dès sa jeunesse pour les recherches mathématiques, elle s’instruit sous la direction de Clairaut, dont elle se déclare la docile élève, et fait des progrès surprenants, arrivant bientôt à assimiler toute la science mathématique, physique et astronomique de son temps.

Bien qu’elle passât sa vie à faire des expériences, elle n’a réalisé pour sa part aucune découverte. Elle joue néanmoins son rôle dans l’histoire des sciences. Elle vulgarisa en effet Liebniz et Newton. Ses Institutions de physique font connaître au monde savant la doctrine du premier, la traduction des Principes de Newton, suivis d’un

  1. Abbé de La Porte. Histoire littéraire des femmes françaises, Paris, 1767. Alletz. Esprit des femmes célèbres ; Almanach de nos grandes femmes. Paris, 1789.
  2. Almanach de nos grandes femmes.