Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/64

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De même la femme encourt une responsabilité personnelle pour ses actes commerciaux. La contrainte par corps à laquelle la femme ne peut être soumise pour des dettes personnelles s’applique aux femmes marchandes publiques[1].

Ainsi la femme jouit d’une certaine personnalité civile dans la mesure où elle participe aux charges de l’État ou à des obligations professionnelles.

Sa personnalité ne se confond pas comme d’ordinaire avec celle de son mari.

Sans se donner la peine de discuter la raison dernière d’une telle exclusion, les jurisconsultes constatent que les femmes sont inhabiles, pour la raison de leur sexe, à la plupart des fonctions publiques, bien qu’il n’en ait pas toujours été ainsi.

Si les femmes peuvent être chanoinesses, religieuses, abbesses, elles ne peuvent posséder d’évêchés ni d’autres bénéfices, ni être admises aux ordres ecclésiastiques[2].

Tout office judiciaire leur est interdit. Cependant, « elles firent autrefois office de pair et siégèrent au Parlement. C’est là une coutume tombée en désuétude. Présentement, elles peuvent bien posséder un duché femelle et en prendre le titre, mais elles ne peuvent plus siéger au Parlement ».

De même, autrefois, elles rendaient en personne la justice sur leurs terres, mais, depuis que les Seigneurs ne sont plus admis à rendre la justice en personne, les femmes ne peuvent être juges[3]. Ici, le rédacteur de l’article de l’Encyclopédie a bien aperçu l’étroite liaison entre les droits de la femme est les principes féodaux et que la chute de l’un a entraîné la décadence des autres.

Non plus qu’elle n’est apte à rendre la justice, la femme n’est admise à plaider devant aucune juridiction. « Cependant, au xviie siècle, M. de Corbenon émit l’avis qu’une femme peut recevoir procuration pour plaider. La marquise de Créqui l’obtint[4]. »

Par une extension naturelle des privilèges qu’assurait à la femme noble la possession de son fief, toute femme, au moyen-âge, pouvait être arbitre. Mais ce droit, comme les autres, est tombé en désuétude. Affirmant que « les princesses, duchesses, et autre femmes d’un haut rang peuvent être arbitres », un jurisconsulte du xviiie siècle constate que, depuis longtemps, la jurisprudence est d’un

  1. Dictionnaire de jurisprudence.
  2. Encyclopédie : art. Femme.
  3. Ibid.
  4. Ibid.