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DOULEURS ET DÉFAILLANCES.

ignorance de la langue. La signature du maire rassura les conseillers municipaux : ils firent comme lui ; et toute la ville emboîta le pas derrière ses élus. Quelques femmes signèrent, à la bonne franquette, pour leurs maris absents : c’est un peu l’usage. Plusieurs Welches de mes amis, qui s’apprêtaient à quitter l’Alsace, signèrent pour faire nombre, et pour donner un dernier témoignage de sympathie à la ville.

La chose avait marché sans un seul choc jusqu’à trois heures et demie, lorsqu’un honnête industriel, qui sait l’allemand, voulut lire avant de signer : « Mais c’est une infamie ! » s’écria-t-il à la dernière page. Il jeta l’appariteur à la porte, courut chez ses amis, leur ouvrit les yeux, donna l’éveil, et mit toute la population sur pied. On s’émut, on cria ; chacun voulut reprendre sa signature. Trop tard ! la pétition roulait déjà sur la route de Berlin.

Que faire alors ? rédiger une contre-pétition ? se démentir du jour au lendemain ? écrire au chancelier : « Nos origines, nos mœurs, nos cœurs sont français ? » C’était provoquer la colère de M. de Bismarck ; c’était envoyer le tribunal de Saverne à Sarre-Union par la poste. Les résolutions extrêmes ne sont ni dans les goûts ni dans les habitudes de l’Alsace. On se consola en disant : « Nos signatures ont été surprises ; si M. de Bismarck