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ALSACE.

L’esprit religieux n’est guère moins rebelle à la conciliation que le sentiment politique. Les catholiques alsaciens ont deux raisons de haïr l’ennemi : parce qu’il est Allemand et protestant. Ils voient déjà leurs églises ruinées et leurs prêtres affamés par l’exil des fonctionnaires français et l’émigration des familles riches, Quant aux protestants libéraux, qui sont les plus nombreux chez nous, ils exècrent le piétisme prussien, cette religion d’État dont le grand prêtre fanatique est l’empereur Guillaume.

Enfin l’antipathie des deux races est constamment entretenue par le contraste de leurs mœurs. Comme le loup inspire autant de répugnance que de haine à son congénère le chien, on peut dire que l’aversion des Alsaciens pour les Allemands s’accroît de jour en jour par le dégoût. Cette rusticité des gens du Nord, qui a fait merveille en campagne, ces appétits grossiers, cette ignorance du luxe et du confort, ce dédain de toute élégance et parfois de la propreté même, ces habitudes parcimonieuses, pour ne pas dire crasses, ont plus étonné que séduit nos compatriotes de l’Est.

Les Alsaciens ne sont pas des délicats à la mode de Paris, mais ils n’ont rien du goujat et du rustre. Ils aiment ce qui est bon ; ils apprécient ce qui est beau, tiennent la maison propre, prennent soin de leur corps, recherchent le mobilier, le linge,