Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/128

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vous savez aujourd’hui qu’il serait monstrueux de réclamer à vos patrons tout ce qu’ils ont gagné par vos mains. Mais il vous semble à première vue qu’on fait la part trop grande au capital, trop mesquine au travail. Et, forts de cette idée, vous fixez un minimum au-dessous duquel vous ne travaillerez plus.

Ce qui vous pousse à ces résolutions un peu désespérées, ce n’est pas seulement la passion de votre droit bien ou mal étudié ; c’est aussi le besoin, la cherté toujours croissante de la vie, cette exagération de tous les prix qui suit depuis quelques années la hausse absurde des loyers. J’entends bien. Nous aussi, nous trouvons que le beurre est cher ; nous disons que tantôt Paris ne sera plus habitable que pour les gens de Bourse et les filles. Il nous plairait de voir notre travail payé plus cher à mesure que la difficulté de vivre augmente autour de nous. Cependant nous ne menaçons pas de tuer l’industrie qui nous occupe ; nous faisons un peu plus d’ouvrage, et tout est dit.

Vous avez eu raison de réclamer la liberté des coalitions ; le législateur a bien fait de vous l’accorder : il était monstrueux qu’une classe de citoyens fût désarmée, en présence d’une autre armée de toutes pièces. Reste à savoir si vous n’avez pas tort d’user si vite et si largement de votre droit.