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Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/283

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voile ; elle répondit gaillardement : « Soyez sûrs que si j’entre au couvent, je choisirai un couvent d’hommes. » C’est dans un couvent de femmes que je griffonne ce feuilleton.

Un rédacteur de l’Opinion nationale, interné au monastère de Sainte-Odile, voilà certes du nouveau. La légende prétend que Charlemagne, Louis le Débonnaire, l’empereur saint Henri, le pape Léon IX, Frédéric Barberousse, Richard Cœur de Lion et autres personnages de haute volée ont habité tour à tour ces modestes cellules et nourri de leur sang les aïeules de nos puces ; mais c’est la première fois, j’en réponds, que l’Opinion nationale vient se faire manger ici.

J’y suis d’ailleurs en bonne compagnie. J’ai pour voisins Gustave Doré et Adolphe Leleux, un auditeur au conseil d’État, charmant garçon plein d’esprit et d’entrain, un ingénieur qui passe sa vie à percer des puits artésiens dans le Sahara, un chirurgien fameux, le seul qui pratique l’ovariotomie avec un succès presque constant : inutile de vous dire que l’un s’appelle Degousée et l’autre Kœberlé.

N’allez pas croire au moins que nous soyons entrés à Sainte-Odile comme les compagnons du comte Ory à Faremoutiers. Presque tous les hôtes du couvent y ont amené leurs familles. Celui-ci a gravi la montagne en compagnie de sa mère, cet autre a sa femme et sa fille avec lui. Le monastère